Étranger

par zeio, mercredi 27 août 2014, 00:22 (il y a 3524 jours)

I

Lui, entra par la porte de devant, comme il en avait l’habitude, ne broncha pas, ne salua personne, entra. Il avait les mains gelées. Je n’en savais rien, je le devinais seulement, comme il gardait ses mains dans les poches de son manteau, fermées sans doute, deux poings fermés, qu’il tenait fermement dans ses poches, sans les retirer, tandis qu’il restait là, debout, statique, dans l’entrée, sans rien regarder d’autre que le salon devant lui. Attendait-il ? quoi, je ne savais pas précisément, dans le doute je restais là moi aussi, après avoir refermé la porte d'entrée derrière lui, j’étais bien au chaud, il venait d’entrer dans une maison agréablement chauffée, tandis que moi je m'y trouvais depuis plus longtemps que lui, dans la maison agréablement chauffée et je me dis qu’elle lui faisait du bien, cette chaleur enveloppante, au milieu de cet hiver redoutable. Du reste il resta là, debout dans l’entrée, et moi aussi, debout, longtemps, assez longtemps peut-être, et quand cela avait assez duré, je laissais échapper un soupir qui ne signifiait rien de particulier, qui ne cherchait pas à signifier quoi que ce soit de particulier, qui ne signifiait rien d’autre qu’un soupir, laissé échappé, là, à ce moment précis, sans raison précise. Probablement cela déclenchait quelque chose, quelque part, à l’intérieur, ou dans la pièce où maintenant avait résonné quelque chose qui ressemblait à un ébranlement, une impulsion de vitalité nerveuse, loin de l’hiver sinistre extérieur, où tout semblait mort, enseveli sous la neige, neige suffisamment dense, asphyxiante, extérieur où tout paraissait redoutable et blanc, ce soupir était un signe probablement, le signe qu’il était temps, de quelque chose, un élan, un pas, une autre chose plus vague qu’un pas, qui pouvait dorénavant croître, se libérer, remplir l’espace. Lui, debout, frappa le sol de l’entrée, pour se départir de la neige accumulée sur ses chaussures. Je répondis « Oui », puis je l’aidais à ôter son lourd manteau, lourd en raison de l’eau accumulée dans le cuir, lourd en raison de la neige et du froid, en raison de l’épuisement. Il entra, finalement.

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