Pourquoi je te lis (basculement)

par zeio, mercredi 03 septembre 2014, 01:53 (il y a 3521 jours)

Si je te lis, c’est pour reprendre le cours, hors vide, du voyage latent,
partir plus loin, ailleurs, loin d’ici, au-dedans, dans ton ventre, cet ressac d’où jaillissent
ces flots de lave sacrée qui me hantent. Pour l’ensorcellement momentané, dont l’écho
m’accompagne invariablement, écho dont je ne peux me défaire, écho encore, qui va et vient
en même temps que le vent clair, dans les forêts impénétrables et bleues de nos marges intérieures.
Si je te lis, c’est pour regarder mourir l’heure, et l’ordinaire avec elle, au fur et à mesure de leur abolition
voir apparaître et s’amplifier l’échappement déraisonné d’un millier de tremblements sans cause déchiffrable.
C’est parce qu’il est temps, c’est parce qu’il est déjà trop tard, c’est parce que je ne sais plus, et que je souhaite
me perdre, devenir, marcher à nouveau dans la tombée de la nuit avec toi, dans l’angle, dans les territoires à redéfinir,
aller non par saccades, mais dans la chute même, trouver la vitesse nécessaire à l’émerveillement, à l’essor de libres
et versicolores déversements. C’est pour ronger les barreaux de fer qui me divisent et m’éloignent, pour rompre
le processus lent du délabrement, charges sourdes de l’obscurité et du mensonge au relais des tombes.
Si je te lis, c’est pour arpenter ton mal qui dégénère en clartés. Envahir ton beau livre, d’un bataillon
de soldats d’argile qui viennent, comme des pensées sensibles, se poser sur ton front et ta solitude,
faire reculer les lignes et les ombres. Pour investir ta nuit, me fondre dans tes étoiles idoines,
y demeurer, maculé de rayons cosmiques, de cendre, de pluie, de mots.

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