deuxième chose

par Claire @, mercredi 17 septembre 2014, 11:27 (il y a 3508 jours) @ Claire

Ce que tu m'écris ici me semble répondre aussi au dernier mail que je t'ai envoyé, que je vais poster (seulement les parties intéressantes pour ici) juste après. Mail écrit dans un moment d'intense découragement ....ça fait un bon moment que ça dure, ou plutôt extrémité d'un questionnement sur ce que signifie pour moi cette activité : "écrire", et plus encore, sur ma légitimité.
Dans ce mail, finalement, je disais qu'il me fallait revenir à mes propres fondamentaux (le travail que j'ai fait toute ma vie) et cesser de jouer au touriste dans l'écriture.
Depuis, d'autres choses se sont passées, d'autres échanges, qui m'ont à nouveau redonné envie et courage d'écrire. (en particulier un poème superbe de Christian Edziré Déquesnes "Le chemin d'Arthur" que je vais lui demander la permission de poster ici). Il recommence lui aussi à éditer une revue.

Je suis frappée en te lisant d'une double impression : d'abord d'une colère ("porte qu'on vous ferme au nez ou sur les doigts"), autour de ce que tu as pu développer et proposer comme écoute de l'écriture des autres, et comme traduction de tes ressentis à ce sujet, que tu sens avoir été refusés. Ensuite une évidence : c'est comme si tu disais toi aussi "je traverse la porte fermée en revenant à mes propres fondamentaux". C'est à dire à ce que tu vis en ce moment de passionné, avec tous ces projets et ces collaborations, dans l'énergie commune d'artistes que tu fréquentes au quotidien, et à ce qu'il y a de spécifiquement québécois dans ce qui circule (dis-moi si je me trompe)

Il y a deux jours, je lisais un texte de Camus qui parlait du théâtre et qui disait que s'il l'aimait tant, c'est parce que c'est le seul endroit où il avait retrouvé la camaraderie et la ferveur de certains engagements, entre gens unis dans un projet commun, projet qui avait ceci de particulier qu'on mettait toute sa force et tout son soin à créer quelque chose d'éphémère. Il disait, "j'écris du théâtre parce qu'une scène de théâtre est un lieu où je suis heureux".

Mais tu vois, je me suis dit aussi ceci : notre cœur nous apprend quelque chose d'important sur la vie. C'est qu'il y a alternativement systole et diastole. Je crois que c'est pareil pour l'art : il y a un moment pour aller vers dehors, y compris l'étranger, le presque hostile, l'incompréhensible et l'incompréhension, et un moment pour rentrer au dedans, au centre. Ils doivent alterner, sinon c'est le vide de la mort.

Dernière petite note : dans ma boîte aux lettre, avec la revue, avec le dernier numéro de Décharge où 411 a sa place, il y avait aussi un livre de Winnicott que j'ai commandé "La capacité à être seul", qui parle bien de tout ça.

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