histoire d'un t-shirt

par zeio, samedi 20 septembre 2014, 03:32 (il y a 3505 jours) @ cloud

Là où tu dis "combler un manque" je vois plutôt exprimer, expulser par l'expression poétique ce manque (envie) qui déborde de soi. Le manque prend source dans un appétit qui déborde, si on veut, plutôt que dans un vide. Un vide n'exprime pas de manque. Il exprime, sinon rien, du moins l'absence de ce manque. Je ne vois pas le manque comme étant une sorte de vacuité en soi (à combler donc), mais au contraire un débordement de l'appétit. De plus si le manque est à première vue un désir de combler un espace au-dedans de soi, je crois que ça va plus loin que ça, j'ai presque envie de dire que le manque est d'abord un désir de trouver un lecteur dans lequel s'épancher, un être qui serait en mesure de nous recevoir. Peut-être ici s'agit-il d'une sensibilité plutôt masculine mais à mes yeux c'est ça, l'impulsion poétique : un désir d'être reçu, réceptionné.
La poésie est une crue quelque part, une émergence, c'est un geste depuis soi vers l'extérieur, et ce que tu dis va a contrario de cette idée, pour toi, la poésie draine depuis l'extérieur des sensations, émotions, présences, aptes à combler un vide en soi. Pour moi, c'est une sacrée illusion. L'écriture renvoie, de façon démultipliée des sensations récoltées ça et là dans le monde, en y mêlant les richesses intérieures et visions propres à l'auteur, il les vomit, les étale ou les dessine, mais c'est un don, de soi vers l'autre. Elle est l'expression d'une vision, une flèche décochée, un don, une mise à nu, mise à mort, mise au monde. Je crois que la volonté d'écriture est puisée dans un trop-plein à extirper hors de soi, à offrir comme un don de soi et de ses forces, non pas dans un vide personnel à combler. Un poète est un "donneur d'énergie" en quelque sorte, pour ma part au-delà de la forme je pense que c'est ce qui marque son authenticité.

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