banalité du rêve

par LOL, dimanche 19 mars 2017, 23:22 (il y a 2591 jours)

ville fantasmée. – c'est la nuit. nous avons les mains froides. hors de l'édifice se dispersent les amis. comme nos mains, tremble l'air des ruelles. pourtant c'est un froid à geler les sens, figer la vie. à ne pas sentir trembler les choses, l'air la buée ni les doigts. j'entre dans un tabac. j'aurais pu acheter des clopes, de l'alcool à vomir, mais ce n'est pas ma fonction aujourd'hui. j'y suis pour une amie. le tabac est bondé, la file dégueule des portes, les heures défilent. on me questionne. angoisse. tic tac tic tac. au fait les gars, pourquoi je suis là? pour qui? pas seulement pour moi. l'amour d'une jolie peut-être, l'amour d'une mère, en plus de l'amour des bonbons. j'ai la liste des friandises écrite sur la paume, une liste interminable, vertigineuse, mon antisèche. derrière moi, ça se bouscule, ça frémit, ça râle. tic tac ouvrir la bouche, tic tac tic tac invoquer sa voix: tic tac tic tac tic tac, l'effort inhumain. tic – un monde à soulever – tac, une fièvre. on dirait charlotte gainsbourg môme timide maladivement la pauvre au JT devant ces cons de présentateurs. – autre chose? ne regarde pas l'antisèche, surtout pas non, même pas un coup d'oeil. je dégouline de peur. la grosse vendeuse, elle doit pas comprendre. fait chier, ça trépigne en hargne derrière, à côté, partout. les gens de la file, ils disent rien mais y suintent la rage, les intentions meurtrières ça se sent. bordel, allez, sue et souviens-toi. combien de carambars, quels goûts? les minutes passent. les heures? la vieille est stupéfaite. rien ne sort. je me retrouve à fuir dans la ville à toutes jambes. sans rien, même pas le souvenir de la boutique. ça n'a pas existé. j'ai du me réveiller et oublier entre temps. ça ressemble à paris vaguement. le marais. j'ai un pressentiment. aussitôt confirmé, une appartion: – ça fait un bail mehdi! gêné, rien à dire. vieil ami d'enfance, comme un frère indésiré. ça vous reste, on s'en défait pas. se retenir de soupirer. s'enquérir de sa santé, de sa vie donjuanesque, du bon état de sa misogynie, fff. deux étrangers à qui il reste un lambeau de sympathie mutuelle. quand même content de le voir après tant d'années, mais rien à lui dire. prétendre avoir à faire ailleurs. retrouver des gens (qu'on vient de quitter en vrai). – on s'appelle! (ouais, on se rappellera pas). sourire, se taire, partir. continuer à fuir. cesser de fuir. d'abord, courir pour courir, courir pour la joie du mouvement, le bonheur de s'épuiser au vent de nuit. le rêve mime la sensation. la propulsion, l'appui, le souffle. incroyable cette faculté que possède l'irréalité de mimer réellement le réel. les mouvements, l'impression qu'ils laissent dans le corps. être persuadé d'éprouver ce qu'on éprouve, avant de comprendre que non on ne créait qu'une hallucination subtile, invocation intérieure, mixture fragmentaire, confusion symbolique – défilé des situations de malaise –. c'est à en devenir idéaliste. puis se trouver une fin. retrouver la mère. comme dans les mauvaises séries policières, manquer de se faire écraser sur la route par négligence. être coursé par un clebs. courir avec elle soudain, bondir sur un muret à gauche, s'accrocher aux grilles, narguer la sale bête au visage de flic. être à la mer, dans une calanque, avec une conteuse. rire en écrivant l'absurdité de la succession. s'arrêter. se dire comme tant d'autres, mais en l'ayant soudain en soi réalisé, intégré, approprié, momentanément, gravement, se dire d'un coup que ce qu'on appelle chronologie, sens des événements, sentiment de compréhension par la logique causale, clarté bienheureuse, n'est finalement pas beaucoup plus rassurante quel l'éclat et le choc simultané, anarchique, délié des contraires. ne plus rien savoir et las jusqu'aux nerfs, les nerfs du ventre, affreusement las de tourner vinaigre, parce que c'est fini rêver, las, se réveiller, ne plus rien savoir et se lever enfin, parce qu'il est 11h et qu'on a des choses à faire, vous savez celles dignes d'intérêt – se dépêcher d'amener sa vieille barque au garage renault, par exemple.

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