Cela fait quelques temps maintenant

par julius-c, lundi 19 juin 2017, 16:51 (il y a 2474 jours)

Cela fait quelque temps maintenant que nous savons qu’il y a une chose à faire. Une chose voilà, nous ne savons pas laquelle, une série d’action toutes tirées vers un même but, qui par elles-mêmes soient totales, qui aboutissent également à quelque chose de total.

Nous ne savons pas par quel geste commencer. Ce premier geste évidemment est déterminant, et en cela c’est par lui que nous pouvons définir la chose qu’il faut faire. Pourquoi faut-il la faire ? Sera-t-elle comme un acte magique, qui conduirait à une modification de la réalité telle que celle-ci deviendrait nôtre, en quelque sorte, ou plutôt qu’elle deviendrait ce que nous avons toujours voulue qu’elle soit ?
Faut-il donc que ce geste, et les gestes qui en découleront, et le résultat qui-sera-plus-que-la-somme-des-gestes-nécessaires-à-son-élaboration, faut-il donc qu’ils permettent à un processus de se déclencher, pour qu’à l’avenir, plus rien ne soit pareil ? oui évidemment.

A cela pourtant une objection : ce que nous recherchons, ne serait-ce pas la vie même, le processus de la vie, qui est déjà à l’oeuvre et qui l’était déjà avant même que nous soyons constitués tels que nous nous présentons aujourd’hui, comme conscience active ou simplement comme sujets de cette vie, que nous recherchions donc comme un chat tente d’attraper sa queue ? Non, il s’agit d’autre chose. Les gestes que nous cherchons à réaliser pour enclencher un processus nouveau dans nos vies, par cette définition même, n’ont leur idée possible que dans la vie et sur cette terre, car c’est bien là nos conditions d’existence, ou pour parler concrètement : notre atelier.

Nous avons accès à une image vague du résultat de ces gestes. Nous savons ce qu’ils impliquent au préalable, pour être réalisés,-comme connaissance, comme savoirs-faire- implications qui constituent peut-être déjà certains de ces gestes ce qui signifie qu’ils auraient déjà commencé à se produire. C’est possible. Mais dans ce cas : l’avancement dans les gestes ne permet pas une vision plus claire de ce que nous voulons produire. Ceci même que nous sommes en train d’écrire est l’un de ces gestes.

Nous disions : nous ne cherchons pas à imiter la vie. Nous cherchons à réaliser dans la vie autre chose, et ce serait trop peu dire que cette autre chose, c’est nous-même. La vie nous a déjà constitué n’est-ce-pas, nous existons objectivement, par nos corps, par les conséquences de nos actions, par les relations que nous entretenons avec le monde. Que cherchons-nous alors : nous cherchons quelque chose de total, nous cherchons tout à la fois. Nous cherchons à synthétiser ce tout dont la perception nous est donnée. Ce n’est pas une quête neuve : plusieurs tentatives gisent dans notre mémoire, que nous avons croisées sorties des esprits d’autres que nous. Elles ne nous ont jamais paru satisfaisantes. C’est peut être parce qu’elles n’étaient pas les nôtres.

Nous cherchons donc : à synthétiser par le fond et la forme la totalité qui nous est donnée à voir, en nous incluant nous-mêmes évidemment, nous-mêmes en tant que c’est par nous que la totalité peut être donnée à voir. Le monde existe objectivement, en dehors de nous. Peut-être tentera t’on d’accéder au monde objectif. Oui, nous tenterons cela. Il y aura donc à nos gestes plusieurs exercices : déterminer la totalité que nous percevons - déterminer la part de notre subjectivité dans cette totalité perçue - (élaguer du résultat de nos recherches cette dernière part). Si nous nous permettons de placer cette résolution entre parenthèse, c’est que nous doutons encore de sa pertinence : cette part subjective est partie constituante du monde objectif, elle a donc le droit d’exister. Il serait même vain de tenter de la séparer de sa part objective - car sans doute, intérieur et extérieur ne sont qu'une seule et même chose.

Nous disions tout-à-l’heure : la vie est notre atelier. Précisons : tout notre environnement immédiat pourra devenir le lieu de ces gestes et le lieu de leur union en une unité parfaite (ce que nous voulons). Immédiatement, tout de suite en ce moment même, cet environnement se compose : d’une chambre, d’un ordinateur avec internet, internet tout entier, d’un vis-à-vis monotone, d’outils divers (ciseaux, stylos, peinture, encre, marteau, perceuse, cordes, caméra, ficelle, scotch), de nous-mêmes. Nous ne parvenons pas à savoir quoi faire au vu de ce qui nous entoure. Deux questions se posent alors : faut-il changer de lieu ? dans les meilleures conditions possibles, pourra-t-on mieux visualiser ce que nous voulons faire ?
A la première question nous répondons qu'il est possible qu'un environnement mouvementé, éventuellement exaltant (mais il vaut mieux se contenter de peu), soit propice, un lieu où la densité en vie soit forte. A la seconde, nous réalisons que, finalement, nous visualisons ce que nous voulons faire : cela à la forme d’une pensée bien sûr; une image mentale. Elle flotte, ailleurs que dans ce monde, dire que nous la voyons serait trop dire, elle est présente cependant : il y a des visages, des lignes (des fils), une structure vivante. Des mots qui s’écrivent. Ce pourrait être une machine.

Nous savons désormais quel est le prochain geste à accomplir. -Il s’agit sans doute d’une fausse route.

Nous ne cherchons pas à imiter la vie. Mais, disions-nous, nous voulons que nos actions prennent place en elle, elles n’ont pas le choix bien sûr, mais qu’elles prennent place en elle sans heurt, sans la naïveté de croire qu’il est possible de déroger à ses lois. Ainsi donc nous faudra t’il arranger les gestes pour qu’ils agissent non pas sur mais avec la réalité.

Nous en tirons la conclusion suivante : il faudra être attentif à chacun des gestes accomplis dans toute notre existence. Ce que nous observons, notamment, ce sont des gestes qui rencontrent des gestes : comment ces deux gestes se transforment à cette rencontre, quelles en sont les variantes et les régularités ? Afin de comprendre les propriétés de chaque chose que nous rencontrons pour agir avec elle.

Mots-clés : éparpillement (entropie), suivre (vivre avec), monde objectif.

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