l'oeil fixé

par jude, samedi 29 novembre 2014, 18:11 (il y a 3434 jours) @ jude

Honnêtement, je n'en attendais pas tant!
Recevoir cet écho de vous m'a fait un grand plaisir(surtout vue l'ambiance parfois étrange, violente et délétère de ce forum, qui me surprend et m'attriste).
J'écris très peu, et moins encore de poésie. Il me faudrait une liberté de corps et d'esprit surtout dont je ne peux disposer.

Bref, j'étais en partance et il s'agissait là d'une dernière bouteille à la mer. J'ai brièvement retravaillé un vieux poème de 1989, pour la beauté du geste en quelque sorte...

Encore une précision à tous : je n'aime pas l'hypocrisie, les faux-fuyants, la dissimulation. J'interviens sur ce forum en tant que jude et je ne me cacherai jamais sous un autre nom. Maintenant, je ne garantis pas que personne ne puisse usurper mon identité... Je ne connais rien aux mystères de l'informatique.

Comment te dire, Catrine? C'est émouvant mais terriblement inquiétant et violent de recevoir ta lecture. J'avais fini par croire que j'étais un exemplaire unique, bizarroïde , décalé et complètement weird comme tu dis.
Mon esthétique, pour une bonne part est classique. Le dix-septième français est un de mes jardins. Lors de mes études, j'ai eu l'occasion de découvrir une critique marquante de Doubrovsky je crois sur le Cid de Corneille, de celles qui coupent le souffle et accélèrent le coeur. Voilà pourquoi, lorsque tu as employé le terme « lame d'une épée » quelque part, tu es tombée pile à la pointe des choses.
Il s'agit de l'épée de Rodrigue qui fend son moi en deux, de celle de Chimène qui la sépare en deux êtres luttant l'un contre l'autre. Oui, c'est une lutte contre soi-même, dont on ne peut sortir sans dommage. On perd tout, absolument, forcément, mais c'est là qu'on peut gagner tout aussi (du moins de ce qui reste à sauver)

Il n'y a aucune haine, Claire, l'esprit et le cœur sont bien au-delà. L'autre, qui envoie le paquet, a sa liberté ; on le respecte infiniment (parce qu'il a été, est peut-être encore un alter ego) mais on a le droit de refuser d'ouvrir ce paquet parce que la plus haute des fidélités est d'abord d'être soi-même (on se trahit déjà si souvent soi-même!).Mais tu as raison aussi. Le je est si faible, ce pauvre roseau souffrant, qu'il ouvrira peut-être le paquet parce que comment s'empêcher d'espérer encore avant la mort ou bien pour s'écharder le cœur, et ce sera une façon de s'éprouver (peut-être le côté masochiste qu'on te reproche, Catrine;-)))Tiendra-t-il sa résolution ? Rien de moins sûr !

Voilà pourquoi j'ai hésité à détacher le dernier vers et à mettre un futur parce qu'avec un conditionnel, tout le rêve, l'espoir, le terrible et fol espoir, le « tu » est encore là grâce à cette indécision du « je », ces états de flottement, de doute, d'hésitation qui te sont si chers, Claire. Aucune haine, aucune ! Lorsque l'on s'est tué à s'empêcher d'éprouver les sentiments que l'on éprouve encore, quelle haine pourrait-il y avoir contre un être qui vous aide (fût-ce en dépit de lui-même) à vous accomplir plus parfaitement ?

Le Cid est un conte de fées. L'infante est là qui marie Rodrigue et Chimène. Hélas , « Notre vie » comme dirait Maupassant, n'en est pas un !

Merci encore à vous, Catrine et Claire, à Zeio, Kel, et à ceux qui ont lu ce texte !

Fil complet: