un extrait de "Travail du poème" d'Ivar Ch'Vavar

par seyne, mercredi 20 juin 2018, 13:38 (il y a 2131 jours) @ seyne

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"Je parlais des images - au sens d'images poétiques. Il en va dans la poème des images comme du reste. On a les images qu'on peut, mais il se peut que les images d'un poète-travailleur, poète plâtrier ou maçon (il vient de parler du facteur Cheval), - eh bien, les images sont toujours données de toute façon ou elles sont fausses, fabriquées, et leur inauthenticité apparaîtra bientôt. Je veux dire que cette manière d'écrire - celle des sous-doués de l'écriture - parce qu'elle est très risquée et hasardeuse, qu'elle compte beaucoup sur la chance...alors, la chance, justement, elle la provoque, par l'ouverture même de l'esprit, béant, qui reçoit tout comme ça lui tombe sur le groin.
Or, l'image est l'effraction. Par quoi entre le réel. Elle rompt le cours du poème - pour le lecteur : l'auteur, lui, il a à peine le temps d'apercevoir les images, il lui en choit une sans qu'il les voie ; parfois il en ramasse bien une qui a quand même besoin d'un coup de burin, d'une petite retouche, il l'a vue du coin de l'œil, l'image, qu'il lui fallait une retouche...Donc l'image rompt le cours du poème. Mais elle ne fait pas que briser sa linéarité : elle troue sa surface, quand le poème a pu devenir une surface. (Par ce trou entre le réel). Elle en creuse l'espace, quand le poème a pu construire son espace"...


Je sais qu'on parle encore d'autre chose ici - quoique...mais je glisse naturellement vers cette réflexion sur l'image poétique, parce qu'elle me semble assez fascinante



J'ai tiré cette citation du dernier livre paru aux éditions des Vanneaux consacré à Ivar Ch'Vavar, une sorte de brève anthologie accompagnée de repères biographiques. Un livre magnifique qui survole toute son œuvre, très éclairant. C'est dans la collection "Présence de la poésie", ça vient de sortir.

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