COURANTS

par Périscope @, mercredi 30 septembre 2020, 11:13 (il y a 1317 jours)

COURANTS

Au coin de la rue le plombier vend sa boutique
En face de l’église les bureaux sont vides
mais un cinéma fait toujours son cinéma
Le marché du vendredi est plus important que le marché du mardi
La fleuriste est plus souriante que celle d’autrefois
Sur les perrons les rampes continuent d’accompagner l’escalier
Les maisons blanches sont éternelles
Quelque chose se réveille au fond de la gorge
La brasserie n’a pas changé de nom
mais dans les venelles
Un parterre de canas grimpe au treillis
mais dans les venelles
Au portail rouillé pend une paire de cadenas neufs
mais dans les venelles se glissent les malvenus revenant
Reste un terrain à construire encore
luzerne et chardons se disputent les mottes de terre
Le temps a muré les portes
Les oiseaux répètent les inlassables vols ramés de leurs ancêtres
Sur les trottoirs des ombres décrépies
sur les maisons le crépi des murs
sur les tombes le débris des fleurs
sur les lèvres des noms à voix basse
dans les allées les arrosoirs épousent les mains des pleureuses
Un parfum passe sur les phalanges ridées
Les fenêtres du curé ont rénové leurs croisées
Aucune maison n’ose se hausser d’un étage
C’est que le vent est maître ici
Le bateau a été décroché des voûtes de l’église
Dans la rue principale la rue toujours est principale
ses figures où dansent derrière les fantômes
Dans la poussière brillent des quartz
les mêmes que l’enfance égrenait
Les gendarmes ont fermé leurs volets
il n’y a plus de voleur
à part les mémoires qui se souviennent
Le facteur distribue ses lettres dans des maisons vides
où gisent de vieux crucifix
On regarde le ciel
la lumière inchangée
l’océan qui contourne le village
l’eau aussi tourmentée que nos chagrins
Les voix se taisent
pour que grincent les chansons sans visage

Fil complet: