Le fermier, la chouette et la souris

par casimir, mardi 26 mai 2015, 21:59 (il y a 3269 jours)

Un fermier tombe dans son puits. Une chouette se pose et propose de le sauver. En échange elle demande de lui qu'il lui amène son prochain repas. Le fermier, qui désire retrouver les grands champs de blé, compagne comme marmots, pense à la souris qui loge dans le grenier. Il accepte la proposition et la chouette lâche alors une corde attachée à un sanglier. Le fermier s'en tire, remercie la chouette, et s'en va attraper le rongeur. Il pose un piège devant le logis de la souris et celle-ci, par maladresse, s'empresse de se faire attraper. Aux abois elle demande pitié. Le fermier, un homme aux abords bourru mais sensible, est ému. Tous deux pleurent à chaudes larmes mais la souris se résout à son sort, un peu comme un personnage de tragédie. Elle qui a tant de fois connu la menace du chat, de ce gros chat paresseux qui dort dans la cuisine pour être au plus près de sa gamelle, se dirige vers l'échafaud. Son heure devait bien arriver. Le fermier la prend dans sa main et se rend à l'orée du bois où sur une branche d'un chêne est posée la chouette, qui se régale d'avance devant le repas qui s'annonce. Mais le fermier, homme aux abords certes bourru mais ingénieux, pense d'un coup à une idée et demande à la chouette si elle ne préfère pas commencer par des hors d'oeuvre. La chouette, ravie de trouver gastronome chez un homme pourtant si bourru, fait donner des ordres : on amène petits fours et foie gras sur des toasts, qu'elle dévore sur l'instant. Elle aiguise ses crocs et s'apprête à fondre sur le petit animal qui se rétracte de peur mais le fermier l'arrête et lui demande si elle ne préfère pas, puisqu'il convient de faire les choses bien, une entrée. Le volatile approuve, hoche la tête d'un air sérieux, et on fait venir du lièvre faisandé que la chouette avale avec bonheur. Elle s'approche encore une fois de la souris mais le fermier défend qu'elle n'est pas réellement appétissante et qu'il faudrait bien l'accompagner d'une sauce, de condiments, d'épices, un peu de sel ou un peu de poivre, un peu de thym ou un peu de persil. Le volatile approuve une seconde fois, félicite le fermier pour son bon sens paysan et on apprête une petite casserole. On fait venir une belette des environs, à la réputation incontestée de bonne cuisinière, qu'on dérange en plein anniversaire. Pour patienter demande le fermier, pourquoi ne pas profiter d'un petit en-cas ? Encore une fois la forêt s'agite et on amène à la chouette plusieurs poignées de vers de terre. Arrive le moment fatidique où la chouette s'avance vers son repas mais le ventre lourd elle doit bien admettre qu'elle n'a plus faim et tombe endormie de sa branche. Une fois au sol le fermier récupère l'animal, rentre chez lui en compagnie de sa compagne et des marmots. On fait rôtir la chouette et on réserve à la souris les deux yeux globuleux. C'est ainsi que cette partie de la France, que je ne citerais pas, a pour spécialité le rôti de chouette et que l'entente entre hommes et souris y est parfaite. En revanche on déconseille aux marmots de sortir la nuit puisqu'il s'avère que la chouette était la reine locale de ses congénères et que, dans un but de vengeance, ils attaquent désormais à vue.

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