houellebecq
Un poète mort n'écrit plus. D'où l'importance de rester vivant.
Ce raisonnement simple, il vous sera parfois difficile de le tenir. En particulier au cours des périodes de stérilité créatrice prolongée: Votre maintien en vie vous apparaîtra, dans ces cas, douloureusement inutile; de toute façon, vous n'écrirez plus.
À cela, une seule réponse : au fond, vous n'en savez rien. Et si vous vous examinez
honnêtement, vous devrez finalement en convenir. On a vu des cas étranges.
Si vous n'écrivez plus, c'est peut-être le prélude d'un changement de forme. Ou d'un
changement de thème. Ou des deux. Ou c'est peut-être, effectivement, le prélude de
votre mort créatrice. Mais vous n'en savez rien. Vous ne connaîtrez jamais exactement cette part de vous-même qui vous pousse à écrire. Vous ne la connaîtrez que sous des formes approchées, et contradictoires. Égoïsme ou dévouement ? Cruauté ou compassion ? Tout pourrait se soutenir. Preuve que, finalement, vous ne savez rien; alors ne vous comportez pas comme si vous saviez. Devant votre ignorance, devant cette part mystérieuse de vous-même, restez honnête et humble.
Non seulement les poètes qui vivent vieux produisent dans l'ensemble davantage,
mais la vieillesse est le siège de processus physiques et mentaux particuliers, qu'il
serait dommage de méconnaître.
Ce raisonnement simple, il vous sera parfois difficile de le tenir. En particulier au cours des périodes de stérilité créatrice prolongée: Votre maintien en vie vous apparaîtra, dans ces cas, douloureusement inutile; de toute façon, vous n'écrirez plus.
À cela, une seule réponse : au fond, vous n'en savez rien. Et si vous vous examinez
honnêtement, vous devrez finalement en convenir. On a vu des cas étranges.
Si vous n'écrivez plus, c'est peut-être le prélude d'un changement de forme. Ou d'un
changement de thème. Ou des deux. Ou c'est peut-être, effectivement, le prélude de
votre mort créatrice. Mais vous n'en savez rien. Vous ne connaîtrez jamais exactement cette part de vous-même qui vous pousse à écrire. Vous ne la connaîtrez que sous des formes approchées, et contradictoires. Égoïsme ou dévouement ? Cruauté ou compassion ? Tout pourrait se soutenir. Preuve que, finalement, vous ne savez rien; alors ne vous comportez pas comme si vous saviez. Devant votre ignorance, devant cette part mystérieuse de vous-même, restez honnête et humble.
Non seulement les poètes qui vivent vieux produisent dans l'ensemble davantage,
mais la vieillesse est le siège de processus physiques et mentaux particuliers, qu'il
serait dommage de méconnaître.
houellebecq
c qu'un vieux con.
houellebecq
bah moi ça me semble très vrai, ce qu'il dit. c'est ce que je ressens plus ou moins.
houellebecq
l'un n'empêche pas l'autre.
houellebecq
rester vivant, oui, c'est un sacré texte (et puis il était encore jeune quand il l'a écrit !).
houellebecq
j'ai l'édition originale sortie en 1991 aux éditions de la différence. je l'ai acheté vers 1992. ce fut un sacré choc à l'époque.
houellebecq
Je comprends, je l'ai lu plus tard mais ça m'a marqué aussi ! J'aime tous ses premiers livres, moins à partir de La possibilité d'une île.
houellebecq
J'adore Houellebecq. Ses livres sont aussi froids, cliniques, que sa poésie est touchante. En fait non, ses livres ne sont pas froids, la fin des Particules Elémentaires par exemple, où le personnage s'avance dans la mer jusqu'à ce que celle-ci l'engloutisse. Ou la Possibilité d'une île, où les personnages se clonent, enfermés dans leurs immenses propriétés, seuls car n'ayant plus l'obligation d’interagir entre eux physiquement... Nan, vraiment, j'adore Houellebecq.
houellebecq
Bonne idée de citer Présence humaine. Très bon disque.
houellebecq
et le disque de jl auber ? c'est bien ?
houellebecq
Franchement, ça fait bizarre d'écouter aubert avec des textes. L'album est très touchant, un peu variétoche mais très touchant.
houellebecq
oui, mais je ne le trouve pas froid : amer, salé, doux quelquefois, drôle, honnête surtout.
oiseux
- pas de texte -
houellebecq
Baudelaire, son conseils aux jeunes littérateurs, il l’a écrit à 24 ou 25 ans.
Rilke, ses lettres à un jeune poète, il a commencé à les écrire à 28 ans.
Il va de soi que dans ce type d’écrits la plupart du temps les auteurs s’adressent à eux-mêmes.
Pour être plus précis, en bons poètes qu’ils sont, ils extirpent d’eux-mêmes la parole de l’autre, cet autre plus ancien que leur corps, plus sage et expérimenté "qu’eux-mêmes". Et ils partagent cette parole mystérieuse extirpée. C'est quand ils ne trouvent plus l'accès, n'entendent plus cette parole de l'autre, cette "cette part mystérieuse de vous-même" comme il dit, que le poète se sent, non pas mourir mais mort tout court. Rester vivant en quelque sort c'est tenir ce lien, qui n'a pas cessé et ne cessera jamais d'être un mystère.
Houellebecq considère la poésie comme étant la forme suprême de l’art.
Rilke, ses lettres à un jeune poète, il a commencé à les écrire à 28 ans.
Il va de soi que dans ce type d’écrits la plupart du temps les auteurs s’adressent à eux-mêmes.
Pour être plus précis, en bons poètes qu’ils sont, ils extirpent d’eux-mêmes la parole de l’autre, cet autre plus ancien que leur corps, plus sage et expérimenté "qu’eux-mêmes". Et ils partagent cette parole mystérieuse extirpée. C'est quand ils ne trouvent plus l'accès, n'entendent plus cette parole de l'autre, cette "cette part mystérieuse de vous-même" comme il dit, que le poète se sent, non pas mourir mais mort tout court. Rester vivant en quelque sort c'est tenir ce lien, qui n'a pas cessé et ne cessera jamais d'être un mystère.
Houellebecq considère la poésie comme étant la forme suprême de l’art.
houellebecq
Sinon, je pense que dans le processus poétique, cette sensation de "mort" en "période de stérilité créatrice", qui ressemble plus à une forme de pourrissement, de fermentation, est indispensable. Ça n'est donc pas du temps perdu.
houellebecq
très juste, françois.
l'inconscient continue à "travailler" pendant les périodes de non-création.
l'inconscient continue à "travailler" pendant les périodes de non-création.
houellebecq
jusqu'à atteindre, plus ou moins en sourdine, la masse critique, le seuil qui permet que ça reparte, que ça bascule
houellebecq
Bientôt par l'auteur d'"extension du domaine de la lutte" : la peinture est-il plus, ou moins, ou aussi suprême que la danse ? Et dans celle-ci, la peinture à l'huile est-elle plus, ou moins, u aussi suprême que la peinture à l'eau ? Ou peut-être que la peinture à l'aérographe ? Ou que le graphisme par ordinateur ? La chanson, qui associe poésie et musique, n'est-elle pas plus suprême que la poésie seule ? Ou plutôt la chanson pop, qui associe danse, poésie, musique, vidéo et célébrité ?
Comment définir la suprêmeté d'une forme d'art ?
Voilà ce qu'en pensait le XVIIe siècle - ç'a tenu 150 ans avant d'être chamboulé par la Révolution Française :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Hi%C3%A9rarchie_des_genres
Le dernier paragraphe nous indique ce qu'il en est advenu, et c'est très houellebecquien :
Le prestige de la peinture d'histoire perdure et marque les salons officiels, jusqu'à la fin du XIXe siècle, mais ce genre est plutôt une option, et le résultat des nombreuses commandes de l'État pour les églises, bâtiments officiels, et le musée de Versailles, qu'une consécration pour un artiste.
Dans ce sens, l'art le plus suprême de nos jours serait le design web et publicitaire, héritier direct de la peinture en bâtiments publics, qui enrichit considérablement les copains des uns et des autres, et augmente leur prestige, mais qui ne constitue pas une bien grande consécration.
Ne devrait-on pas plutôt rejeter, avec l'étiquette "oiseux", le fait d'accoler un superlatif à une forme d'art ?
Comment définir la suprêmeté d'une forme d'art ?
Voilà ce qu'en pensait le XVIIe siècle - ç'a tenu 150 ans avant d'être chamboulé par la Révolution Française :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Hi%C3%A9rarchie_des_genres
Le dernier paragraphe nous indique ce qu'il en est advenu, et c'est très houellebecquien :
Le prestige de la peinture d'histoire perdure et marque les salons officiels, jusqu'à la fin du XIXe siècle, mais ce genre est plutôt une option, et le résultat des nombreuses commandes de l'État pour les églises, bâtiments officiels, et le musée de Versailles, qu'une consécration pour un artiste.
Dans ce sens, l'art le plus suprême de nos jours serait le design web et publicitaire, héritier direct de la peinture en bâtiments publics, qui enrichit considérablement les copains des uns et des autres, et augmente leur prestige, mais qui ne constitue pas une bien grande consécration.
Ne devrait-on pas plutôt rejeter, avec l'étiquette "oiseux", le fait d'accoler un superlatif à une forme d'art ?
houellebecq
oui, allons carrément plus loin et considérons comme oiseuse toute tentative d'établir des hiérarchies entre les activités. Par exemple entre mourir sur la croix pour sauver le monde et se couper les ongles de pieds....je rigole mais pas tant que ça. La manie de la hiérarchisation empoisonne la vie.
houellebecq
C'est quand même Houellebecq lui-même qui a écrit "extension du domaine de la lutte" pour protester contre le classement universel. Ou peut-être pour en chanter la louange ?
houellebecq
c'est vrai ça, personne n'a pensé à se couper les ongles de pieds pour sauver le monde, alors qu'a priori, il n'y a pas de raison que ça marche moins bien qu'en mourant sur la croix...
houellebecq
Luc 7,38 (Cette scène est fondatrice du masochisme chrétien.)
Pour sauver le monde, il faut couper les ongles des pieds de quelqu'un d'autre.
Pour sauver le monde, il faut couper les ongles des pieds de quelqu'un d'autre.
houellebecq
ah ouais, faut être pédicure
houellebecq
et acide, voire aigre :)
houellebecq
Ou pécheresse...