Verbe d'herbe au pied d’arbre

par Kel, jeudi 11 septembre 2014, 10:33 (il y a 3517 jours)

Il vaudrait mieux
Ne pas être né dans une ferme

Ne pas avoir grandi
Au milieu des poules et des cochons

Si tu veux écrire
Il vaudrait mieux
- par exemple
Ne pas être animal politique
Ni anti-atomique

Ne pas avoir pour père
Un paysan de culture
Bretonisante
Ne pas avoir pour mère
Une féministe nature
Ne pas avoir pour famille
Deux frangins
Des proches que tu aimes
Ni pour famille planète
Le sentiment d'être un peu frère

Si tu livres en plus
De la vie
Ne cherche pas de livre
Pour la recueillir

Il vaudrait mieux
Etre atomisé

Ne pas avoir pour pays
Une contrée trop belle
Ni trop vivante
Ni trop particulière
Ni trop fière

Il vaudrait mieux
Si tu veux écrire
Ne pas être de Bretagne
Ni même de France - si ça continue
Ni même d'ailleurs
Mais n'exister
Nulle part

Ne pas avoir pour langue
Une langue tordue de douleur
Une langue vivace

Il vaudrait mieux
Ne pas avoir de racine
Ni de sève

Avoir, l'argent
Cuillère en or dans la bouche
Avec le matériel
Tout le tralala
De l'air du temps à consommer
Sans gêne

Un coeur de métal
Sans souffle... Dans les cuivres
Non minéral

Ne pas avoir de matière
Ne pas être attaché à quelqu'un
N'aimer personne
Ne pas avoir de lien
Ne rien vouloir dire



A présent qu'écrire
C'est devenu
Moins que du vent sur le papier
Comme les journalistes d'aujourd'hui
Vendus pour taire les non-dits


Si malgré tout tu résistes
Tu veux écrire
Tu persistes dans les signes
Malgré tes pieds dans la glaise
Et ta tête en l'air

Malgré toutes les anomalies de la nature
D'aujourd'hui

Ecrivain d’herbe
Sur des pauvres feuilles

– même quand tu parais léger
Tu restes arbre...

Issu du grand arbre généalogique
De nos histoires





Ne te plains pas trop
D'être isolé

Tu n'es pas très haut
Mais aux beaux jours revenus du noir
Tandis les temps des cerises
En lutte contre les éléments
Artificiels
Trouvent refuge
Dans le coeur de l'hiver
Vaille que vaille
Malgré le froid
Au charbon

Revenus de la nuit
Réunis
Nous reprendrons des couleurs
A nouveau
Nous respirerons ensemble
Encore
Au poumon de la terre

Nous retrouverons le chemin
De la forêt

Nous irons cueillir les fruits
A peau rouge
A chair tendre

Les enfants viendront faire leurs cabanes
En poussant des cris et des rires
En compagnie d'oiseaux migrateurs
Nichés dans les branches

Chantant la musique familière
Du lointain
Nous nous sentirons pousser des ailes
Une autre fois...


Pour le moment
Fais comme tu peux
Plie toi mais
Je te supplie...

Ne romps pas

les pieds d'arbre ne font pas de pas.

par Claire @, lundi 15 septembre 2014, 17:15 (il y a 3513 jours) @ Kel

Je me suis un peu interrogée, Kel, sur ce que représentait pour toi le passé, et ce qu'il construit de l'identité, comme une sorte d'idéal perdu. Ce poème semble dire : quand on a ce passé et cette identité, il n'est plus possible de trouver son rôle dans ce monde, il faudrait que les choses reviennent en arrière....enfin je caricature, mais quand même, ça laisse une impression un peu démobilisante.
Il me semble qu'une identité est avant tout un point de départ, un socle, et que le monde (tel qu'il est) est l'autre point de départ, l'autre socle sur lequel se déploie l'action. Et que tout est mouvant.

les pieds d'arbre ne font pas de pas.. mais ont des racines

par Kel, lundi 15 septembre 2014, 18:38 (il y a 3513 jours) @ Claire

...et ils ne sont pas immobiles mais communiquent avec "tout" y compris le cosmos. Je pense pareil que toi sinon. Juste je dis que c'est handicapant, dans une certaine mesure, ce passé de caractère. Dans une autre, au contraire. Sans idéaliser, je suis loin d'avoir connu une enfance idéale, je constate... Les dégâts sur la nature et aussi les peuples. Pas revenir en arrière (au pied de mon arbre, je vivais etc, non) mais au moins arrêter les fausses routes, celles qui sans cesse conduisent dans les murs. Et puis j'ai repensé à ce texte (ancien) à la suite du fourre-tout orienté de denis qu'il avait donné en liste l'autre fois, alors voilà une autre façon de dire.

les pieds d'arbre ne font pas de pas.. mais ont des racines

par Claire @, lundi 15 septembre 2014, 18:59 (il y a 3513 jours) @ Kel

oui, d'accord avec toi en ceci : la route vers l'indifférenciation est mortifère, parce qu'elle écrase la différence et ne laisse plus que l'inégalité....mais je crois que la différence est à recréer sans cesse.

les pieds d'arbre ne font pas de pas.. mais ont des racines

par Kel, lundi 15 septembre 2014, 19:31 (il y a 3513 jours) @ Claire

C'est vrai aussi. Je vais y penser...

les pieds d'arbre ne font pas de pas.. mais ont des racines

par Kel, mardi 16 septembre 2014, 14:15 (il y a 3512 jours) @ Kel

la différence est à recréer sans cesse, oui, mais pour moi les bases restent les mêmes..

...

par Kel, jeudi 18 septembre 2014, 12:19 (il y a 3510 jours) @ Kel

...ami
Ne te plains pas trop
De ta solitude
Ressentie
Tu n'es pas très haut
Les beaux jours ont plongé dans le noir
En attendant un printemps de cerises
En lutte contre les éléments
Artificiels
Créés du mal
Trouvons refuge
Ensemble
A la courte échelle
Au coeur en l'hiver
Douleurs et malheurs
Le cœur de l’amour
Nous réchauffe
Veille et réveille
Malgré le froid
Du charbon
Sois chardon


Revenus de la nuit
Enfin réunis
Nous retrouverons nos couleurs
Nous serons à nos rêves
Pour de bon
Nous respirerons ensemble
Un jour pour toujours
Au poumon de la terre nouvelle
Comme la pomme
A la sève

Nous retrouverons le chemin
De la forêt
Un matin

Nous irons recueillir les fruits
A peau rouge
Chère douce
Recueillir les fleurs
De nos souhaits passés

Les enfants font leurs cabanes
En poussant des cris et des rires
En compagnie des oiseaux migrateurs
Nichés dans les branches

Chantant la musique familière
Du lointain
Nous nous sentirons pousser des ailes
Une autre fois... Comme avant
Mais différemment


Pour le moment
Fais comme tu peux
Fais comme moi
Plie toi mais
Supplie-toi...
Ne romps pas.

...

par Kel, jeudi 18 septembre 2014, 12:41 (il y a 3510 jours) @ Kel

nan c'est naze
vais faire une pause, me changer les idées.