nouvelles photographiques (7)
Ce sont les derniers mots que je l'ai entendu prononcer. Je suis restée muette, contemplant l'étendue du désastre, puis j'ai fait demi-tour et je suis partie. L'escalator gris élevait sa denture inclinée devant moi, je l'ai gravi, j'ai marché quelques minutes dans les couloirs presque déserts. La réalité était tout à fait immobile, ou plutôt défilait autour de moi immobile, et marchant. C'est l'affiche d'un film qui m'a fait à nouveau faire demi-tour, revenir sur mes pas, sans raison. D'une fenêtre aux vitres sales qui surplombait une portion de trottoir je l'ai vu soudain, de dos. Il était accoudé au parapet, il se penchait pour voir en dessous, les voies, les rails. J'ai vu son col relevé, son manteau noir, ses épaules. Peut-être qu'il me cherchait des yeux sur le quai. Le parapet faisait un angle aigu avec un muret, derrière lequel des bâches poudrées de neige cachaient des masses informes. Dans cet angle, je voyais le vide brumeux des voies, la courbe parfaite des rails reflétant le blanc du ciel. Il s'est redressé, et il est parti.
nouvelles photographiques (8)
C'est le début des années cinquante, l'homme porte un béret enfoncé sur la tête, un manteau de laine visiblement élimé. Sur son revers, un ruban de deuil comme on en portait à l'époque. Il a une écharpe de laine écossaise croisée dans le col du manteau, une main dans la poche, l'autre dans le dos. Il est assez jeune, le corps lourd, un peu cambré, pieds écartés. Contrairement à un autre homme derrière lui, il ne sourit pas devant le spectacle de ce grand vieillard en cape et bicorne à plume (sûrement un académicien), qui monte dans un taxi. Son regard est au-delà du monde, la ligne de sa bouche fermée. Il y a une forme de bonté sur son visage triste, absent. Le vieillard est visiblement attentif à la difficile manoeuvre qui consiste à pénétrer dans l'habitacle sans heurter le toit, au risque de faire tomber son extravagant couvre-chef. L'homme derrière l'homme triste éclaterait sûrement de rire.
nouvelles photographiques (8)
par sobac 
, mardi 07 mars 2017, 11:59 (il y a 2613 jours) @ Claire
retranscription d'une époque révolue
des clichés de vie saisis sur le vif en argentique grand angle noir et blanc
on imagine les odeurs, les vêtements des femmes la une des journaux et en toile de fond l'amour
des clichés de vie saisis sur le vif en argentique grand angle noir et blanc
on imagine les odeurs, les vêtements des femmes la une des journaux et en toile de fond l'amour
nouvelles photographiques (8)
par Périscope , samedi 11 mars 2017, 18:53 (il y a 2609 jours) @ sobac
Nouvelle 8
Là, le descriptif se tient jusqu'au bout.
On sent un plaisir à garder la distance.
C'est une esquisse minimaliste.
Une pudeur à dire plus, laissant ce rôle au lecteur. Justement, tu le sollicites, l'invites à ce jeu d'une devinette psychologique, c'est voyant, c'est la règle du "jeu" pour ce genre de texte.
Pourquoi pas.
Là, le descriptif se tient jusqu'au bout.
On sent un plaisir à garder la distance.
C'est une esquisse minimaliste.
Une pudeur à dire plus, laissant ce rôle au lecteur. Justement, tu le sollicites, l'invites à ce jeu d'une devinette psychologique, c'est voyant, c'est la règle du "jeu" pour ce genre de texte.
Pourquoi pas.
nouvelles photographiques (7)
par Périscope , samedi 11 mars 2017, 18:45 (il y a 2609 jours) @ Claire
La description et la subjectivité du "je" me laissent perplexe.
Ces deux points de vue oscillent, ni l'un ni l'autre ne s'impose, et le lecteur reste dans un purgatoire, ou limbes, en fin de compte un peu frustrant.
Encore une fois, je crois qu'il faut oublier le "photographique", cela nous ramène à l'exercice et c'est dommage.
On attendrait, pour ma part, que quelque chose se lâche.
Ces deux points de vue oscillent, ni l'un ni l'autre ne s'impose, et le lecteur reste dans un purgatoire, ou limbes, en fin de compte un peu frustrant.
Encore une fois, je crois qu'il faut oublier le "photographique", cela nous ramène à l'exercice et c'est dommage.
On attendrait, pour ma part, que quelque chose se lâche.
nouvelles photographiques (7)
Je tâtonne beaucoup, c'est pourquoi les commentaires me sont très utiles. Le tien me renvoie une évidence : c'est un problème qu'il y ait un narrateur qui dit (je) et une histoire construite , surtout aussi convenue que celle-ci. Il faut qu'il y ait un instant suspend,,avec son atmosphère particulière, et que le lecteur soit libre du passé et du futur.
nouvelles photographiques (7)
par Périscope , dimanche 12 mars 2017, 14:56 (il y a 2608 jours) @ Claire
oui je crois que ça vaut le coup d'essayer
nouvelles photographiques (7)
par Catrine , dimanche 12 mars 2017, 19:03 (il y a 2608 jours) @ Claire
oui