Exclusion - delivre.net

Exclusion

entendre leurs paroles
ne rien comprendre à leurs paroles

rentrer dans leur maison
ne rien pouvoir posséder de leur maison

monter dans leurs autos
ne pas savoir piloter leurs autos

écouter le récit de leurs voyages
ne pas être capable d’imaginer leurs voyages

marcher dans leurs jardins
ne rien sentir du parfum de leurs fleurs

s’asseoir à leur table
ne pas être digne de s’asseoir à leur table

boire les vins de leur cave
ne pas savoir reconnaître les grands crus de leur cave

manger dans leur vaisselle
ne pas remarquer le design de leur vaisselle

prendre place dans leur canapé
ne pas remarquer le design de leur canapé

profiter de leur jacuzzi
ne pas pouvoir se laver dans leur baignoire

aller dans leurs magasins
ne pouvoir rien acheter dans leurs magasins

regarder leurs tenues vestimentaires
ne pas apprécier le discrétion élégante de leurs marques vestimentaires

observer la sveltesse naturelle de leur silhouette
ne pas pouvoir se soumettre au régime de la sveltesse naturelle de leur silhouette

se promener dans les vieux villages de leur pays
ne jamais trouver une pierre sale et noire dans les propres villages de leur vieux pays

découvrir leurs opinions
ne pas adhérer à toutes leurs opinions

recueillir l’histoire des malheurs de leur vie
ne pas saisir les raisons des malheurs de leur vie

bénéficier de leur hospitalité
ne pas avoir ce jour là été à la hauteur du message de leur hospitalité

avoir été convié au milieu de tout
se sentir exilé de tout comme de soi-même

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Ces restrictions bien poétiques sont pourtant une histoire mille fois vécue mais si peu dite, merci à toi Périscope de nous l'avoir écrite ici.

Fraternellement.
Fabrice le Rouge-gorge

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plus moins
l'exclusion a mille facettes, la vivre est une autre paire de manche, c'est l'histoire du blanc du noir des couleurs que tout oppose mais si complémentaires

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J'ai mis longtemps à saisir ce poème, qui semble commencer comme un discret (et un peu convenu) réquisitoire : pauvre (ou pas très riche) contre riches (depuis longtemps)...
....ce qui est fascinant c'est comment ce propos "convenu" et donc légèrement ennuyeux évolue peu à peu au fil des vers :

d'abord vers le sentiment de honte que tous nous éprouvons face à l'aisance aristocratique des riches-depuis-longtemps, honte dont il y aurait beaucoup à dire, car elle nous renvoie à notre nature de mortels face aux demi-dieux que nous nous créons, expérience qu'on sent ici au plus près du vécu personnel, loin de toute idéologie (et on est toujours le minable de quelqu'un) ..

ensuite à la prise de conscience d'autre chose, encore plus subtil : la responsabilité que nous avons dans cette barrière dont nous prétendons être seulement victimes, autant dire notre part de haine, si diluée qu'elle soit, notre part de refus de l'autre, de mépris en miroir d'un autre mépris, notre exclusion de celui par qui on se perçoit exclu...

Tout ceci ne s'opposant en rien à la réalité de la lutte des classe, bien sûr, fouillant ses mécanismes intimes.

Je n'ai pas lu tout de Proust, mais il parle beaucoup de ça.

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Oui la responsabilité de notre honte

la lutte des classes existe toujours, on maquille les termes

les classes moyennes, c'est l'écran de fumée qu'on y substitue idéologiquement

Proust avait une conscience très subjective de la réalité sociale
mais juste

il en était autant victime que responsable

seulement sa lucidité, "il la mettait dans son froc" comme disait Léo Ferré

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