Chambre d'écho
Sur le trottoir, les meubles. Elle n’a pu sauver que cela. Elle n’est pas seule dans la rue, mais chacun dans ces moments là est seul. Certains donnent un coup de main, comme on dit, amènent un peu de réconfort, mais la question de l’entre aide, à cette époque, ne se pose plus. Lui est dans une intériorité, et il ne peut prêter main forte. Il ressent le spectacle, il frappe contre une paroi qui ne se dérobe pas car l’heure n’est pas encore venue. Il entend les gens crier sur le trottoir. Ils s’agitent pris par leur désespoir. Lui, n’est que la chambre d’écho d’un monde, dehors, en désastre.
Il est en admiration pour elle, c’est la troisième fois que l’événement se produit. A chaque fois, elle « repart à zéro », c’est l’expression qu’elle emploie toujours, avec douleur et fierté, et lui n’en finit pas d’applaudir son courage. Mais elle l’ignore, ne se soucie pas de lui. Elle à d’autres préoccupations, il lui pardonne. Si elle savait que lui existe déjà, en serait-t'elle plus héroïque ? De toutes manières, elle ne peut pas faire autrement. « Sauver les meubles », c’est l’urgence. S’assurer un toit. Mais lequel maintenant ? Lui devrait profiter d’en avoir encore un, même précaire, incertain, aussi exposé que celui de tous les habitants du quartier. Ce qui le sauve aujourd’hui, c’est la volonté, la rage, la force de celle qui combat sur le trottoir où s’amoncellent les débris de toute une vie, entamée, et qu’il faut continuer coûte que coûte. Il s’en veut d’être là, inopérant. Il ne peut hurler, elle n’en souffrirait que plus, alors il assiste, il enregistre, son corps reçoit les secousses comme un sismographe qu’il faudra décrypter plus tard.
Parfois, dans son malheur, elle a un geste, pour lui. Un geste, qui sans doute lui échappe, un geste prémonitoire, un geste tendre, au milieu des flammes, des sirènes, des hurlements. Le geste qu’elle fait, et que les autres font toutes dans pareille situation. Il y a des gestes anodins, spontanés, qui deviennent symboles parfois pour celui qui les reçoit. Mais l’heure est à d’autres ouvrages, ranger les objets, les machines à écrire, les tables, des dossiers épargnés par miracle, un matelas, car il faudra bien dormir.
Il n’ose imaginer ce moment où le corps devra se reposer. Il se sent mourir, il entend les pulsations, subit le souffle avec trop de conscience, il est à nu dans l’existence et cela ressemble à une mort. Elle dormira quelques heures sur son matelas, elle, tombée d’épuisement, elle, dans un rien devenu effrayant. Lui pourrait en profiter, se manifester, sans brutalité lui faire comprendre, lui faire comprendre qu’il est là. Quel orgueil ! Alors aussitôt il se rétracte. Il a honte. Il est dans un sommeil de voyant. C’est insupportable.
Le lit est sur le trottoir. La gazinière aussi, mais pour faire chauffer quels aliments ? Un poste de radio, pour écouter de la musique, alors que les informations du monde sont terrifiantes. Quelques chaises rococos, pour faire asseoir des invités qui ressemblent à des mendiants, avec leurs pieds écorchés, leurs mains sanguinolentes d’avoir remuer trop de gravats.
« Je vais recommencer à zéro » elle dit toujours. Il l’entend. Il l’entendra plusieurs fois. Autour d’une table, dans un fauteuil, répéter « A chaque fois j’ai du recommencer à zéro ». Il ne lui en veut pas. Il aimerait pouvoir lui prendre la main, mais une distance le lui en empêche. Il l’observe, nerveuse, voûtée, il voit les scènes de la guerre qu’il n’a vécues que de loin, il entend les bombes qui incendient les maisons.
Aujourd’hui quand elle s’allonge dans un lit, juste un petit coin de lit, il la regarde, mais l’appréhension n’est plus la même. Un jour, elle lui a dit, dans le silence qui de plus en plus remplit ses visites, « Tu sais… tu ne peux pas t’imaginer… ». Il lui a répondu d’une voix presque éteinte « Si maman, j’étais là, mais je ne pouvais encore rien te dire, dans ton ventre ».
Chambre d'écho
C'est beau ! Un grand bravo
Chambre d'écho
un écho sans trémolos , la vie rude et inégale, injustice à la naissance, et puis vie entre chaos et bonheurs fugaces, le sort de trop de gens
beau et bon texte
beau et bon texte
Chambre d'écho
Ce que je trouve étonnant dans ce texte plein d’empathie c’est la façon dont se superposent et se mêlent différentes strates temporelles dans la relation mère-fils. Et aussi la question du dedans/dehors : maisons, ventre maternel, et ce qui s’échange à travers l’espace et les parois. Aide, protection mais aussi isolement, impuissance.
isolement, impuissance
claire
ma très chair claire
pourquoi vous n'avez jamais voulu
me masturber
alors que je vous l'avez demandé
à plusieurs reprise
vous savez très bien
que moi aussi
j'avais ressenti
dans cette chambre d'écho
le doux poison
l'amphétamine morte
la peau subdivision
cette prison violente
jusqu'à la fermeture du bois
perdu dans les fougères
bleues
isolement, impuissance
ma très chair claire
pourquoi vous n'avez jamais voulu
me masturber
alors que je vous l'avez demandé
à plusieurs reprise
vous savez très bien
que moi aussi
j'avais ressenti
dans cette chambre d'écho
le doux poison
l'amphétamine morte
la peau subdivision
cette prison violente
jusqu'à la fermeture du bois
perdu dans les fougères
bleues
isolement, impuissance
isolement, impuissance
là div je n'ai pas compris la raison de ton message
isolement, impuissance
simple provocation.
volonté de se singulariser.
volonté de se singulariser.
isolement, impuissance
dis-toi que tu n'en sais rien, et donc tais-toi, ce sera plus réaliste.
isolement, impuissance
juste en ce qui me concerne : il n'y a pas d'offense.
et puis au niveau littéraire - qui est le sujet de ce forum - je trouve belle toute la deuxième partie du message. Et comme dans cette affaire des perles et du vomi, se pose la question des rapports entre cette beauté et l'obscénité qui les précède.
(à moment donné, sur le forum bleu, on était allés interroger l'étymologie de ce mot : "obscénité", c'est très intéressant.)
et puis au niveau littéraire - qui est le sujet de ce forum - je trouve belle toute la deuxième partie du message. Et comme dans cette affaire des perles et du vomi, se pose la question des rapports entre cette beauté et l'obscénité qui les précède.
(à moment donné, sur le forum bleu, on était allés interroger l'étymologie de ce mot : "obscénité", c'est très intéressant.)
isolement, impuissance
quel message désagréable !
dès que ça touche à div tu perds tout sens de la mesure.
dès que ça touche à div tu perds tout sens de la mesure.
et toi ?
- pas de texte -