ce n'était pas ma candeur

par catrine, vendredi 26 décembre 2014, 19:49 (il y a 3410 jours)

c'est l'année de mes seize ans que j'ai pris conscience pour la première fois d'un instant de mort imminente à l'intérieur de moi. ce n'était pas que ça ne me soit jamais arrivé, mais je ne l'avais jamais ressenti jusque là. nous étions à discuter avec mon oncle que j'idéalisais de connaissances et savoirs. il n'avait que vingt et un an, mais ça me semblait énorme comme l'âge adulte paraît lointain et bizarrement fascinant quand on y est pas encore. je me souviens très bien lui avoir proposé que l'évolution humaine devait passer par plus de conscience et que notre entendement devait se rendre capable de lire les signaux de l'inconscient pour arriver à ne pas répéter les gestes contondants qui nous piègent depuis le passé vers le futur, pour nous dégager du passé et atteindre qui nous sommes vraiment. je me souviens aussi très bien de la rondeur de ses yeux tandis qu'il me regardait, hébété. il m'a répondu que c'était impossible voire dangereux, et je lui ai dit qu'il le faudrait pourtant. je suis morte à ce moment là. je suis morte et je l'ai senti précisément dans ma poitrine, et dans mon ventre, puis dans ma tête. ce n'était pas ma candeur qui mourait alors, non, c'était comme si une lumière s'éteignait d'une forme d'espoir, et la mort de cette forme d'espoir me séparait du monde.

ce n'était pas ma candeur

par catrine, vendredi 26 décembre 2014, 23:28 (il y a 3410 jours) @ catrine

hors quelques temps plus tard survint une seconde mort, et celle-ci me parvint par le biais d'un rêve. dans ce rêve j'étais couchée sur le dos dans mon lit, dans la chambre de la maison réelle que ma famille habitait à cette époque. je réfléchissais à la condition humaine, poursuivant tout haut le discours du livre que je venais de terminer de lire dans l'après-midi même, tout à fait comme si j'en avais été l'auteur. la lumière changea à peine dans le rêve que je vivais pour une realité tangible. je me mis à bander sous les couvertures, mais bander totalement d'un sexe masculin que je tenais dans ma main gauche, tandis que ma main droite contenait mon scrotum et le serrait un peu. je ressentais un bien être profond de ce sexe turgescent et de ces couilles chaudes dans mes mains qui s'activaient à me donner du plaisir et une detente mentale. au moment de l'orgasme dans ses sensations les plus complètes je m'éveillai. prise de panique, brûlante et essoufflée, je tâtais mon corps et cherchais mon sexe d'homme irrémédiablement disparu. mon esprit était dans une confusion telle que je n'en avais jamais vécue. et vint la sensation de mort à moi-même, la mort d'une certitude que j'avais portée jusqu'à ce jour, la certitude d'être totalement femme. c'est à partir de ce jour que j'ai dû commencer à apprivoiser des choses indistinctes, imprécises et floues.

ce n'était pas ma candeur

par catrine, samedi 27 décembre 2014, 01:47 (il y a 3410 jours) @ catrine

nous vivions dans une vieille et grande maison appelée "Le Manoir" par les habitants du village. elle avait été bâtie au début des années 1900, et mon père, à peu près architecte, en refaisait l'arrière et la toiture. tous les jours il m'assignait une tâche pour me faire travailler avec les hommes, et ce jour précis il m'envoya décoller les vieux barbeaux d'asphalte sur le toit en mansarde. je grimpai là les pieds nus, avec pour tout vêtement qu'une camisole et un short, coiffée de deux tresses malmenées. les hommes se mirent à rire si bien que j'en ai rougi. au milieu de leurs bruits de gorge je demandai comment il fallait faire. je ne fus pas longue à intrégrer les gestes prestes pour bien manier le pied de biche. je me suis mise au travail en chantant, et j'allai vite. juillet cuisait les hommes et ils sentaient fort. presque nue je transpirais avec eux. je tenais l'outil comme si c'était un sexe d'homme entre mes cuisses et swignais le bassin vers l'arrière et l'avant pour décoller les satanées tuiles molles. au bord du toit, sans attache, les muscles chauffés et durs, le corps luisant et moit, debout parmi les hommes, j'ai eu mon premier vertige d'adulte. une brûlure profonde s'est emparée de mes organes. c'était comme si j'avais les ovaires en feu. et alors mon coeur a cogné trois coups sourds, une image de qui j'étais s'est détachée de mon corps, se dégageant comme d'une enveloppe. elle m'a souri puis s'est évanouie. subitement l'enfant que j'avais été est morte. j'allais tomber quand mon père m'a interpelée pour que je boive.

ce n'était pas ma candeur

par d i v @, samedi 27 décembre 2014, 12:18 (il y a 3409 jours) @ catrine

ce n'était que ma candeur

par catrine, samedi 27 décembre 2014, 16:58 (il y a 3409 jours) @ d i v

aaw wouaAOuw t'es hot flyé d i v ! estie qu'j'aime ça ! suis renversée d i v, proprement renversée ! ta voix et tout l'arrangement donnent des couleurs encore plus sex-weird au sex-weirdisme du texte, tu fais tout ressortir, j'adore ça. j'adore ça ! merci ! c'est super


woaw ze cadeau !
merci !

ce n'était que ma candeur

par dh, samedi 27 décembre 2014, 17:32 (il y a 3409 jours) @ catrine

c'est étonnant ces confessions intimes en pleines fêtes de noël... pourquoi cette envie d'étaler tout ça au regard du lecteur ?

ce n'était que ma candeur

par dh, samedi 27 décembre 2014, 17:35 (il y a 3409 jours) @ dh

ça va sûrement beaucoup plaire à claire.

ce n'était que ma candeur

par Claire @, samedi 27 décembre 2014, 17:55 (il y a 3409 jours) @ dh

oui, ca me plaît beaucoup..
tout le monde ne peut pas aimer le poireau de Costes :)

ce n'était que ma candeur

par anonyme, samedi 27 décembre 2014, 20:53 (il y a 3409 jours) @ Claire

ou les chiottes de denis.

...

par catrine, samedi 27 décembre 2014, 21:53 (il y a 3409 jours) @ dh

denis, je crois que je vais finir par t'asticoter sérieusement le texte si tu continues à vouloir me barber
t'aurais pas une sournoise envie de faire passer tes textures dans mon labo spécial par hasard ...?

...

par dh, dimanche 28 décembre 2014, 10:26 (il y a 3409 jours) @ catrine

fais comme tu le voudras, chère catrine.

ce n'était pas ma candeur

par Claire @, samedi 27 décembre 2014, 17:57 (il y a 3409 jours) @ catrine

j'aime le lien entre les trois textes...une sorte d'élargissement de soi.

ce n'était pas ma candeur

par catrine, samedi 27 décembre 2014, 18:05 (il y a 3409 jours) @ Claire

oui, c'est là et vers ça que ça va
je cherche la racine d'une chose précise

à force de t'écrire et d'ouvrir/articuler le sens de mes sens
je vais parvenir à m'éclairer jusqu'au fond du fond ;)

ce n'était pas ma candeur

par Claire @, samedi 27 décembre 2014, 18:17 (il y a 3409 jours) @ catrine

j'ai pas mal pensé à cette affaire de "s'élargir", depuis nos derniers échanges.
pensé aussi à l'affaire de l'instinct de mort, qui n'a pas grand-chose à voir avec mourir, et même souvent le contraire - qui est répéter toujours la même douleur, la même erreur, bien connues.
et puis, depuis que j'ai lu tes trois textes, à cette affaire de l'identité : sexe, âge, statut social, profession, nationalité, et même allure corporelle etc...comment ça nous enferme, nous obsède ( au sens éthymologique du terme : assiège) et enferme notre liberté.
écrire c'est le territoire de ma liberté, je me suis dit, il faut que je retrouve ça.

ce n'était pas ma candeur

par catrine, samedi 27 décembre 2014, 18:52 (il y a 3409 jours) @ Claire

e n f i n !
alléluia!!



et moi qui travaille ça depuis "l'histoire du mur"
bon sang ! j'allais désespérer

ce n'était pas ma candeur

par Claire @, samedi 27 décembre 2014, 18:26 (il y a 3409 jours) @ catrine

j'ai rêvé deux fois que j'étais un homme, mais jamais rien de si précis ni anatomiquement ni fonctionnellement. C'était juste une affaire d'identité...ca n'avait rien de surprenant dans le rêve. De toutes facons, dans les rêves, l'identité est tres peu importante, c'est peut-être ce qui fait qu'on y est si vivant.
je me demande si les hommes rêvent parfois qu'ils sont une femme.

ce n'était pas ma candeur

par catrine, samedi 27 décembre 2014, 19:14 (il y a 3409 jours) @ Claire

je ne sais pas si les hommes font des rêves de ça
mais je sais que ce n'était pas un rêve d'identité, ou si mais...
ha non ..si je le dis je ne l'écrirai pas... ho puis après..on s'en fout
c'était un rêve qui réveillait une part enfouie et qui m'a rendue complète


complète — entière
ni l'un sevré de l'autre genre
ni l'une sevrée de l'autre genre
mais l'une et l'autre — l'entier

une charade en forme de clin d'oeil :
mon premier n'est rien
mon second se cherche l'autre
mon troisième est un tout
qui suis-je ?

la réponse est :
un être humain