Je me demande

par Périscope @, samedi 11 mai 2019, 17:24 (il y a 1805 jours)

Je me demande


Ecrire c’est continuer ce que la vie a commencé,
alors je reviens aux mêmes images parce qu’elles ne seront jamais vivantes.
L’objet de mon désir est comme la neige qui fond quand on la touche.
Mes mots à chaque fois pour dire l’instant me retranchent de l’instant.
Je me récite souvent de mémoire mon poème, pour en vérifier le bon compagnonnage,
tandis que les chercheurs, pour comprendre le Bing Bang, inventent des mots nouveaux.
Au lieu de ruminer mes rêveries, j’apprends chaque jour une page du dictionnaire par cœur.
Je suis assis devant mon ordinateur comme devant un feu de cheminée,
et c’est souvent le bonjour affable d’une voisine qui me sauve de la métaphysique.
Si mes idées peuvent passer par les trous d’une passoire,
la passoire peut aussi les arrêter.
Le dictionnaire est beaucoup plus excitant, puisqu’il fournit la réponse qu’on cherche.
C’est comme racler le fond d’un pot à confiture,
qui nous apprend à recueillir le fond des cuillères.
Est-il vrai qu’un écrivain trouve ses mots dans les maux de son enfance ?
Il n’y a jamais de pourquoi aux choses,
si on ne leurs demande pas pourquoi.
Un minuscule chardonneret est capable de faire bouger les tiges d’un palmier,
en chantant.
Quelle pourrait être alors la raison de mon silence,
si ce n’était de peindre les nains bienveillants de Diego Velázquez ?
Mes nuits sont des usines à fabriquer le poème,
il y a des matins où je ne respire que par aphorismes jusqu’à l’étouffement.
Heureusement le corps est plus élastique que l’esprit.
Dans mes œillères je perce des orifices pour voir les étoiles,
mais je sais que compter sur mes doigts les pieds des alexandrins est douloureux.
La recherche du mot juste donne l’illusion d’un pouvoir sur les choses.
Il y a un temps où les pensées silencieuses étaient interdites pour la santé,
la page blanche était alors le confessionnal laïc de l’écrivain.
Se vêtir, se chauffer, se nourrir,
seront toujours les verbes les plus difficiles à conjuguer.
Un peintre doit toujours résister à la tentation de rougir les lèvres des filles qu’il peint,
et marcher dans les feuilles mortes curieusement fait le même bruit,
que les feuilles de papier que froisse l’écrivain.
La femme est beaucoup plus métaphysique que l’homme,
puisque dans les petites choses elle voit les grandes choses.
Pourquoi alors l’hiver, les arbres donnent l’impression de sortir de chez le coiffeur ?
Il me sera toujours plus pénible de dire « non » que de le penser.
Hélas ce sont les bouquets les plus jolis qui fanent en premier.
Pour moi la différence entre les mots et les actes,
est que les mots font rêver aux actes.
Seules des réponses courtes suscitent l’envie d’une transcendance,
et plutôt que de perdre quelques miettes sur la route,
le pigeon préfèrera se laisser écraser.
J’ai vu des tempêtes tellement honteuses,
qu’elles attendent la nuit pour se déchaîner.
C’est donc durant le sommeil que les murs tombent.
Il y a des phrases qu’on retient à cause de la voix qui les prononce.
Et c’est surtout parce que quelqu’un vous attend,
que vous avancez !

Je me demande

par sobac @, samedi 11 mai 2019, 19:02 (il y a 1805 jours) @ Périscope

j'aime ce genre de texte qui donne à réfléchir , essayer de trouver la finalité de l'existence, afin de comprendre ce que le prisme nous renvoi


j'ai l’honneur de tout demander, mais de ne rien accepter
L’intransigeance alors, pour alimenter ma persévérance
La même qu’il me faut pour endurer mes souffrances
Continuer de vivre tant que le combat n’est pas gagné

Je me demande

par 411, dimanche 12 mai 2019, 00:52 (il y a 1805 jours) @ sobac

J'aime bien, assez, beaucoup. Pour moi c'est le brouillon d'un manifeste. A suivre.

Je me demande

par Soledad, dimanche 12 mai 2019, 08:49 (il y a 1805 jours) @ Périscope

A la première lecture, je n’ai pas accroché. Je me suis dit, “trop facile mon gars, force un peu”. J’avais beau chercher des enchaînements logiques, je ne comprenais pas les relations qui pouvaient exister entre cet ensemble de phrases hétéroclites qui défilaient en couples, comme si elles longeaient la promenade maritime un beau dimanche de printemps. Couplées pour ne pas dire accouplées, puisqu’elles se fécondent mutuellement, elles prennent la forme d’ une foule qui déambule, bras dessus bras dessous, chacun plongé dans ses réflexions singulières. De temps à autres, ils croisent des “vers solitaires”, qui se suffisent à eux-mêmes, qu’ils sortent entre célibataires, ou pas.
Peu à peu, l’ensemble de ces pensées, construit le cheminement de toute une vie, par l’empilement de réflexions que l’on peut se faire au quotidien sans vraiment quoi savoir en faire, tant elles dénotent notre vision unique de la vie, si ce n’est les laisser se rencontrer et nous raconter. Lentement, l’esprit s’ouvre vers quelque chose de difficilement identifiable, d’une portée universelle, jusqu’au sens…
Finalement, j’aime vraiment beaucoup

Je me demande

par seyne, vendredi 17 mai 2019, 16:12 (il y a 1800 jours) @ Périscope

Je ne sais pas si on peut appeler tes phrases "aphorismes" - en fait je n'aime pas trop les aphorismes, on dirait souvent quelqu'un qui essaie d'être plus intelligent que les autres...rien de cela ici, il y a quelque chose de caressant et simple comme un chat qui saute sur le bureau, fait trois pas et repart, comme sans raison, comme s'il pensait en posant ses pattes. Et tes phrases réclament la pensée mais une pensée ouverte, et qui le reste. On ne peut pas conclure.

Bien sûr, beaucoup de questions sur l'écriture, des questions elles aussi discrètes, mais un peu douloureuses. Ecrire c'et une douleur et un bonheur en même temps.

Je me demande

par Périscope @, dimanche 19 mai 2019, 17:46 (il y a 1797 jours) @ seyne

les aphorismes que j'évoque ne sont pas dans le texte...
J'aime beaucoup la métaphore du chat qui saute sur le bureau

à propos de la douleur de l'écriture, je pense qu'il est plus facile de s'exprimer sur cette douleur, plutôt que sur la joie inexprimable

la joie d'écrire se fait acte, donc sans commentaire

les affres de l'écriture incitent à se retourner sur elles, se plaindre, pleurnicher dans le pire des cas

gloser

merci pour ton accompagnement