héraldique

par julienb @, lundi 07 septembre 2015, 08:56 (il y a 3367 jours)

sous la lumière météore


elle,
de feu
de ciel
d’ombre


de perspective et d’horizon


déroulant
sa lame de sabre


oblique
à côté du jour
s’enfonçant peut-être dans la nuit


d’azur au pal d’argent fuselé d’or et de sinople


métal sur métal
émail sur émail


elle,
de fleuve ;


lui,
marcheur au bord du soir


à la surface des choses
à l’intérieur de soi


lisse
vague
englouti


de chair, de mots, de doutes


aux rêveries de sable chargé d’une étoile de gueules en abîme


observant
une sterne se jeter dans le ciel avec son cri


rejoindre la colonie qui parsème une île de sable


selon un angle impossible
entre Loire et soleil

héraldique

par Claire, lundi 07 septembre 2015, 18:08 (il y a 3367 jours) @ julienb

je préfère cette version, plus "abstraite", visuelle et lumineuse, qui se dérobe presque à l'interprétation.
Le titre va bien avec cette rencontre d'une nature quasi géométrique, altière, aux luisances d'armes, et d'un être humain presque indistinct, hésitant.

héraldique

par julienb @, lundi 07 septembre 2015, 21:55 (il y a 3367 jours) @ Claire

Merci. C'est fort bien et justement commenté.

héraldique

par zeio, lundi 07 septembre 2015, 19:21 (il y a 3367 jours) @ julienb

J'aime bien te lire Julien, je trouve que tu es capable de créer des textes magnifiques, galatée par exemple.
Ce texte là je l'aime moins, il puise trop souvent dans le champ lexical de la poésie dite "proprette" et telle qu'on l'attend dans certains cercles : ciel, ombre, jour, cri, etc.
Ça ne serait pas nécessairement rédhibitoire (après tout ces mots ne sont pas "interdits" et la poésie n'est pas une affaire de dictionnaire) mais la teneur du texte je trouve ne compense pas, comme un collier de brillances dont il manquerait le liant, le fil - la partie la plus prosaïque du collier et à la fois la seule essentielle - c'est à dire quelque chose que je puisse, en tant que lecteur, saisir et faire mien.

héraldique

par Claire, lundi 07 septembre 2015, 20:50 (il y a 3367 jours) @ zeio

personnellement, ce que j'aurais pu reprocher à ce poème ce serait d'être parti sur une "bonne idée" liée à une impression visuelle (un paysage fluvial qui ressemble à un blason), idée qu'on va aller exploiter jusqu'au fond de la métaphore.

Sauf que la figure du personnage humain touche très juste dans sa description, touche à ce qu'on peut ressentir parfois dans une nature sublime. Être un petit machin fugace et aussi insignifiant qu'habité de lui-même. Humain, si humain, de chair faible et mesquine.
Et là, le recours à l'idée du blason, c'est à dire à une figure symbolique qui nomme et écrase à la fois l'individualité, c'est d'autant plus beau que c'est en accord avec le paysage.

héraldique

par julienb @, lundi 07 septembre 2015, 21:57 (il y a 3367 jours) @ Claire

Les commentaires de Claire vont finir par être plus beaux que le poème commenté !

héraldique

par Claire, lundi 07 septembre 2015, 22:08 (il y a 3367 jours) @ julienb

oui, je sais que tu n'as pas fait tout cela exprès, et c'est pourquoi le poème est beau :))

(ça m'est arrivé d'être ébahie de tout ce que je pouvais voir s'articuler dans mes propres poèmes, à posteriori ....)

héraldique

par zeio, mardi 08 septembre 2015, 00:49 (il y a 3367 jours) @ Claire

Je crois que nous sommes là dans une zone un peu trop confortable
Ce poème sera beau dans les sphères intellectuelles
Mais ça ne suffit pas
pour citer gombrowicz, il s'adresse "à celui qui est pénétré de poésie, c'est-à-dire qu'il ne s'adresse qu'au poète"
et dresse son panneau indicateur "attention poésie !"
on peut se féliciter...
mais le temps est court
et les richesses intérieures inexploitées sont nombreuses
Je pense au contraire qu'une forme plus substantielle de poésie se situe ailleurs
dans le fil dénudé suspendu
délesté de brillances
une fois que les perles irisées se sont détachées
une à une
qu'il ne reste plus que lui
emporté par le vent
quand il commence à écrire

héraldique

par julienb @, mardi 08 septembre 2015, 10:33 (il y a 3366 jours) @ zeio

Ce que tu écris est très juste, et c'est une belle voie pour la poésie. Mais je ne pense pas qu'il y en ait une seule, définitoire et définitive. Pour ma part, j'essaie modestement d'en explorer plusieurs, tantôt l'une, tantôt l'autre ; les perles, le fil, le collier entier, l'ombre du collier, l'idée du collier, celle qui porte le collier etc.

trop

par Claire, mardi 08 septembre 2015, 16:07 (il y a 3366 jours) @ julienb

oui, mais en ce qui concerne ce poème précisément, il y a quelque chose de juste dans ce que te dit zeio. Ça ne concerne pas le fond du poème, mais sa forme...un peu trop belle, un peu trop "suivie"...

J'ai pensé ça aussi du dernier que tu as posté, qui n'a éveillé aucun commentaire, alors qu'il était intéressant, sur le fait d'être traversé.
Je me suis dit en le lisant que c'était comme si tu étais un cueilleur de pommes trop consciencieux : tu cueilles toutes les pommes de l'arbre-poème et du coup on se sent un peu trop rempli, et lui paraît paradoxalement dépouillé du manquant, du non-dit.
Pour moi, il faut qu'il reste des pommes oubliées, il faut qu'il y ait des feuilles arrachées par terre aussi (c'est l'image qui m'est venue pour expliquer une sensation vague, mais c'est peut-être seulement ma propre paresse ou mon manque d'appétit).)

trop

par julienb @, mardi 08 septembre 2015, 16:50 (il y a 3366 jours) @ Claire

c'est marrant, pcq je trouve que si j'en ai écrit un où le non-dit est omniprésent, c'est justement cet héraldique. C'est une juxtaposition de deux choses, deux tableaux, deux états, et qui dit juxtaposition dit absence de lien logique apparent, donc à trouver tout seul.
Et c'est encore plus drôle pcq en vrai je suis effectivement en train de cueillir des pommes :) (j'y retourne)

:)

par Claire, mardi 08 septembre 2015, 17:32 (il y a 3366 jours) @ julienb

en vrai on peut tout cueillir.

héraldique

par catr, mardi 08 septembre 2015, 03:04 (il y a 3367 jours) @ Claire

...en même temps, je veux dire : par rapport à ce que tu dis, le poème est-il beau parce qu'il passe juste à côté (au-dessus) de son point de gravité, et ce faisant n'élude-t-il pas cette impuissance sous-jacente (dont le poids, lui, est véritablement écrasant), volontaire voire recherchée ?

...dans la construction du poème cela ne sert-il pas de socle où reposerait une forme ( étrange ) d'humilité ?

et toute cette nature, en somme, ne serait-elle pas un reflet ou l'exacte transposition de ce que l'homme se refuse et qui pourtant le compose ? ... pardon.. je réfléchis encore tout haut... (j'essaie de me freiner ...)

et si le poème avait été nu, nu des beautés, pour n'être que l'écho du poids terrible devant l'immense force du vivant...
n'en aurait-il pas été plus fort encore..? (et ici ma pensée accompagne celle de zeio)




ceci dit, le poème est beau, oui, il est beau et il me fait mal (comme souvent les poèmes de julienb me font mal)

héraldique

par catr, mardi 08 septembre 2015, 03:06 (il y a 3367 jours) @ catr

julienb, pardon de creuser...

héraldique

par Claire, mardi 08 septembre 2015, 16:21 (il y a 3366 jours) @ catr

oui, je te suis bien dans tout ce que tu viens de dire....il me semble que ce qui rend beau le poème c'est tout cela : la force du monde, l'humilité, l'interpénétration, le socle/l'écrasement - mais c'est aussi le lien qu'il fait entre la beauté de la lumière et la luisance des armes, entre le monde inanimé éternel et la symbolique de la lignée humaine.

héraldique

par julienb @, lundi 07 septembre 2015, 21:56 (il y a 3367 jours) @ zeio

Oui, je comprends, il y a du vrai là-dedans et tu as peut-être raison. Mais je n'y peux rien si j'ai vu l'oiseau se jeter dans le ciel avec son cri. Ta métaphore (filée !) est jolie. "Un collier de brillances", c'est déjà pas mal.