bibi et les guenons

par Ecrire, mercredi 09 septembre 2015, 17:45 (il y a 3365 jours)

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Le toubib me signala que je courrais un risque en écrivant sur un thème qui attisait l’anxiété et son cortège de maux associés. Sa réaction était sans surprise. Le danger, effectif. Dans les premiers temps, il se manifestait de façon quasi systématique, quoique selon une intensité variable. Le malaise atteignait son apogée lorsque j’estimais que l’expression produite n’était pas à la hauteur de la visée initiale. Je m’étais confronté au chaos sans parvenir à lui conférer une forme satisfaisante. Cela revenait à perdre le combat dans l’arène symbolique, après avoir échoué dans la réalité. Les émotions que j’avais impudemment réveillées entamaient une existence indépendante de ma volonté. Pire, elles s’activaient dans une direction résolument contraire au dessein d’origine. Faute de les contrôler, je dénombrais les douleurs. Leur dynamique s’avérait circulaire et dotée de dents pointues. Si encore elles s’étaient contentées de poursuivre un travail de sape isolé… Mais non. Elles conviaient d’autres affres, telles des amies enthousiastes qui se téléphonent pour s’inviter à la fête. Ces hôtes en sollicitaient à leur tour de plus anciens, en revisitant le passé de loin en loin. Elles remontaient ainsi jusqu’à la petite enfance, puis déployaient leur zèle au-delà. Elles grimpaient, avec l’agilité de guenons rébarbatives dans l’arbre généalogique de bibi et contactaient jusqu’aux ancêtres les plus reculés. Elles recueillaient les souffrances, les terreurs et les larmes accumulées depuis les balbutiements de la préhistoire. J’héritais de cette collection prodigieusement sévère. Abominable présent biographique et trans-générationnel. Désastre multimillionnaire livré directement du cerveau reptilien à son voisin limbique. Alors, j’avais beaucoup à faire pour survivre.

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