[enceints] — le mur du nom

par catrine, lundi 01 septembre 2014, 10:40 (il y a 3739 jours) @ c. it

[ c.it ]
say it ou see it
dis-le / dites-le
vois / regarde
[ le dire voir ]

le nom donné à la structure
à la forme vivante respirante
à ce corps de vie impliquant

s'affranchir encore de mur du nom du nom donné pour représenter la structure respirante au monde
le nom donné pour reconnaissance d'une naissance arrivée sans connaissance de la structure vie
le nom la définition le sceau la marque le rien déterminant un ceci une cela et sa manière finie quand
jamais fini ni je ni tu ni il ni elle jamais pas même à la mort pas même dans la mort ultime se franchir
s'affranchir des définitions des mots collés à ma peau qui calment et rassurent autrui et autres formes
on m'a dit tu es une forme finie et j'ai entendu circonscrite enceinte prise enfermée appartenante
comme telle chose objet fabriqué matière plastique moulée utile ou inutile facile usable achetable
un ustensile de cuisine un outil une pelle ? un jouet de bac à sable une connerie à trois sous un rien...
alors j'ai vu ce que autrui voyait et j'ai vu que je ne ressemblais pas à ce qui était vu par autrui ni autre
prenant mon nom dans ma main comme un insecte bleu noir une petite chose signifiante sans aile et
pleine de pattes je lui ai demandé s'il pensait vraiment m'appartenir et me signer «penses-tu, vraiment ?»
il m'a dit que j'étais libre et que la chose qui avait été insufflée rêvée souhaitée attendue était que je sois
et que je sois libre ou que je le devienne en découvrant comment franchir les murs prédéfinis des autres
alors j'ai pris au temps un très grand laps et un bain interminable pour me laver la structure externe
chaque membre partie de mon corps avec son nom anatomique chaque pli de la tête au sexe aux pieds
et chaque petite parcelle de peau ma pelure ma pelisse frottée savonnée grattée lavée portait un nom
un nom jeté à ma figure collé à mon front tapé dans mon dos collé partout sur moi et mon corps mon être
je l'ai lavé poncé dadiché bichonné dorloté pour le rendre à ce qu'il était pour me le rendre à moi libre
tout moi lavé et libre je me suis rendue moi à moi oui moi à moi pour toujours toujours pour toujours
j'ai changé l'eau du bain et je suis entrée dans sa transparence comme si elle allait me rendre la mienne
immergée totalement j'ai fermé mes yeux et je suis entrée oui je suis entrée dans ma mortelle mémoire
j'ai pris tous les noms qu'on m'avait donnés jetés lancés hurlés frappés forcés violés battus foutus tapés
je les ai tous rassemblés qui sur un mur l'autre en haut sur ma falaise lui sur sa chaise lui qui pleurait
je leur ai dit que c'était fini que les larmes et la mort interne c'était fini et je que leur devait de les libérer
et je les ai méthodiquement brûlé comme on brûle un corps j'ai fait une crémation intérieure des noms
puis j'ai marcher mon être dans la pluie de cendre blanche j'ai marché jusqu'à moi rendue moi à ma terre
mon territoire sauvage mon beau noir intérieur plein mes pays mouvants d'émouvances et de vies.
chaque jour traversé dans la vie je le traverse maintenant comme ce jour lavé rendu libre hors noms
et je marche parmi vous je m'assied avec vous et je vois les noms collés sur vous tatoué forcé broché
je vois dans vos yeux des noms arriver sur moi et je vous souris parce que plus rien ne me colle au corps
que ma joie très nue et simple de m'être à moi-même rendue libre des noms comme d'autant de murs