精度

par catrine, mercredi 03 septembre 2014, 13:18 (il y a 3737 jours)

le texte qui suit est d'un certain humour... et est présenté en à propos – ou page de présentation — du blog espace/vers,
et je le voulais le plus bref possible (en exergue du néo-bushido)
je le poste ici pour avis et discussion, parce que je pense qu'il est incomplet, et j'ai besoin de vous.. bon, je l'ai dit

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精度 [ Seido, justesse, précision ]




« Le poète doit être sage comme le serpent, puissant comme le lion, ricaneur comme le singe et doux comme la colombe »
— Claire Ceira

Le bushido est le code des principes moraux que les samouraïs japonais étaient tenus d’observer. Il n’y a guère plus de samouraïs de nos jours, ni guère de sabre. Mais peut-être reste-t-il un peu de cet esprit, de cette éthique de l’esprit et du corps, dans l’esprit même de l’écrire de par l’exigence et l’assiduité qui la commandent. Ainsi, ce pourrait-il que la discipline et la rigueur de l’écrire soient l’approche contemporaine, un frôlement d’esprit et de pensée, à la fois une contiguïté et un insu, car, si la lame du sabre reflétait l’âme du samouraï, l’écrire reflète bel et bien celle de l’écriveur.

Bien sûr, les lois strictes du bushido parlent de loyauté et d’honneur, de bravoure et de mort. Mais l’écrire ? me direz-vous. Je répondrais sans la moindre hésitation qu’il en va de même. Il n’est pas de plus grand péril pour l’écriveur que de ne pas respecter son esprit et l’écriture en son esprit, il n’est plus grand danger que de ne pas se mettre en danger, évitant de rencontrer la mort à soi-même, et, il n’est rien de moins brave que de sacrifier au facile.

L’écrire est ce sabre trempé battu chauffé poli, qui chaque jour nous garde tout contre nous-mêmes. L’écrire est une arme blanche contre, mais que se présente l’adversité ! Si vous l’avez oublié, ce sabre, s’il est abîmé d’orgueil, rongé, crasseux, il n’en sera que peu convainquant; s’il n’est plus lui-même et qu’il emprunte, il faudra en payer le prix …et honorer la dette.



[image]
onna bugeisha — femme samouraï

精度

par cat..., mercredi 03 septembre 2014, 15:05 (il y a 3737 jours) @ catrine

bon.. c'est peut-être ..con ...?
je demande..

精度

par Claire @, jeudi 04 septembre 2014, 12:37 (il y a 3736 jours) @ catrine

Ca m'a bien amusée de retrouver cette "citation" au début de ton texte....j'ai essayé de me souvenir au cours de quelle discussion vaseuse j'avais lancé cette boutade. Ce dont je suis sûre c'est que c'était surtout le ricanement qui m'intéressait.

A part ça j'aime beaucoup ce que tu dis-là, beaucoup cette idée d'une pénétration qui n'est possible que dans une certaine rectitude morale et gestuelle, et avec un outil très affûté et personnel, comme peut être pour un guerrier son épée. Et aussi, oui, l'idée de se mettre en risque.

J'aurais aimé que tu postes ici, s'il n'est pas perdu, ce poème que tu avais mis sur comptoirs, où il était question de pas et de flèche. Il y avait un cercle aussi. Je l'ai beaucoup aimé, je ne le retrouve plus, mais il se relie naturellement dans mon esprit à ce que tu dis.

Et j'aime aussi l'idée que lecture demande les mêmes qualités que l'écriture.

Pour finir, deux lambeaux lambeaux d'"Entrez dans le rêve" de mon maître zen, Manset :

ramenez le drap sur vos yeux
entrez dans le rêve

découper le monde à coup de rasoir
pour voir au coeur du fruit le noyau noir
la vie n'est pas la vie

la vie n'est pas ce qu'on nous fait croire





bien entendu je ne fais rien de tout ça, je me contente de dire que ce serait bien etc....




(et j'entends maître zeio grommeler : encore des trucs à la sauce orientale !! :)

精度

par cat..., jeudi 04 septembre 2014, 14:23 (il y a 3736 jours) @ Claire

ha merci, merci pour tes lumières — j'étais en train de m'étouffer de doutes grandissants — et oui, écriture et lecture, exactement, oui, pourtant .. ce n'est pas par posture orientaliste, mais vraiment le fruit d'une très longue réflexion amorcée vers mes quinze ans (moult discussions autour d'un certain référendum sur l'indépendance du Québec, et ensuite autour de son échec décevant.. et le pourquoi du comment, et jusqu'au contexte politique actuel, contexte social aussi..) puis un parallèle entre le Japon et le Québec (dans cette réflexion l'Allemagne clignote comme une pointe de triangle) ce Japon fasciné par la créativité exacerbée de mon petit peuple sans pays, et fasciné de psychologie, et psychanalyse (ils sont pas mal flyés les Japonais..- dans le sens positif, s'entend) parallèle notamment parce qu'îliens (au sens propre et métaphorique), parce que le taux de suicides y est hallucinant, parce que ... bon ce serait sûrement trop long ... mais tout au long des années mon constat s'est affermi, consolidé, éclairé et il va, en gros, comme suit : il manque au Québec un certain recul de soi et une discipline mentale, il manque au Japon une certaine individualité et la liberté qu'elle apporte. et, on peut voir ça comme deux pôles assez extrêmes dont les fruits curieux s'intéressent mutuellement, et qui, s'ils versaient un peu de l'un dans l'autre, pourraient atteindre non seulement à une sorte d'équilibre, ou salubrité des êtres, mais encore atteindre à un mode social-créatif inédit (je ne porte pas le nom d'un socialiste utopiste pour rien me dira-t-on... mais bon, je ne peux pas sortir le Jean-Baptiste Godin de moi ! je ne peux pas sortir le Gérald Godin de moi ! ni aucun Godin qu'il soit d'Europe où du Québec). hors, et je condense un maximum tout ça, de la discipline mentale, et comme pour m'appliquer à moi-même la base du principe et vérifier/valider ma pensée, j'ai élaboré ou construit (ou je ne sais pas très bien comment nommer ça au juste) mon écriture/lecture, un peu comme des katas (d'où sans doute ton lien mental avec le texte "tirez un trait tirez!" que je vais aller te chercher..), exercices et approfondissements qui centrent et ensuite permettent un plus grand recul, structurant à la fois la main, la pensée et l'être, dans un présent présent, dans un réel réel — et oui, ici entre en ligne de compte la pensée de maître Baret (d'où mes enthousiasmes, parce que validant au plus haut degré tout le senti pour lequel d'ailleurs je ne trouvais pas encore le langage - et merci pour ça aussi, et parmi d'autres merci vers toi)... en gros voilà.. je ne sais pas si tu comprends "ma salade"... et désolée pour ce terrible paragraphe qui en contient 35 autres minimum... ;)


j'aime beaucoup ce que tu verses ici de Manset

精度

par cat..., jeudi 04 septembre 2014, 14:58 (il y a 3736 jours) @ cat...

ha... tiens donc, je viens d'ouvrir une grande grande porte ..dans le mur de mon silence..

精度

par Claire @, vendredi 05 septembre 2014, 12:24 (il y a 3735 jours) @ cat...

oui, je crois que j'ai bien tout compris.
Je me disais en te lisant, c'est finalement extraordinaire cet écheveau de toutes les pensées, liens, élucubrations, représentations imaginaires, emprunts, utopies, vénérations, déceptions, qu'on transporte en soi, enrichit, oublie au fur et à mesure mais pas tout à fait.... comme le panier d'une tricoteuse qui garde un petit reste de pelote de chaque pull qu'elle a fait, sans compter celles du bonnet qu'elle ne fera jamais, et sans compter le désordre qui s'y est installé, tout au fond....et sans parler du jeu du chat.

精度

par cat, samedi 06 septembre 2014, 01:23 (il y a 3735 jours) @ Claire

c'est magnifique ce que tu me dis là, et aussi ce lien avec "les tricotteuses" — malheureusement malmenées et salies par l'histoire..

精度 — figuration nº2

par cat..., jeudi 04 septembre 2014, 14:40 (il y a 3736 jours) @ Claire

tirez un trait tirez! — [ figuration nº2 ]
Publié le 14/12/2012










nous tirons des traits des lignes des flèches paroles droites lancées debout devant loin au devant de nos pas semons nous pour demain l’idée à ne pas perdre ce qu’il aurait fallu faire et ne pas oublier surtout dans le limon de l’imprécis qui vient plus vite toujours plus imprécis qu’il n’y paraît

nous tirons des traits sur le passé un tel ou l’autre l’objet jeté parmi des opprobres et des injures les petites hontes les blessures nous tirons sur la ligne cousue des êtres et mésêtres nous tirons sur les fils et les filles pour qu’en adviennent d’autres plus vifs plus présents au présent lui-même puisqu’il court comme le vent nous tirons sur dieu mon dieu tous nos dieux morts nés s’achèvent

nous tirons filons poursuivons le vent le temps des ailes invisibles où sont tes ailes sous les nuages pleins et changeants nous toi moi elle à la ligne point du jour et au point dit une nuit où en est-ce une autre encore coulée lentement trop lentement pour le fuseau de la pensée et des doigts faiseurs

nous tirons nous tirons sur nos patiences et impatiences nous tirons à bout portant sur la tempe de l’humanité nous tirons sur des gestes comme des chiens et des porcs nous ça les qualités des accomplissements réels et rêvés mais cette corde passant en plein centre du corps cette ligne de fuite parfaite du courant du monde que nous pensons savoir sans jamais vraiment approcher passe et nous traverse bel et bien à un moment ou à un autre ou à un autre ou à un autre ou…

du fil du monde qui se tisse si rapidement que nul oeil ne puisse l’apercevoir le présent dans ta présence et le sens que tu ne te sais pas ce glissement des choses que tu n’avais pas vues et qui surgissent soudain comme le monde surgit à lui-même montagne grains de celle qui fait tempête dans le vers et l’eau traverse coule traverse coule par ce même fil regarde entre tes doigts coule

et les mêmes gestes recommencés encore et encore comme les gestes d’une Pénélope une Perséphone éternelle te souvient-il ou est-ce les gestes de l’archer tirant le même filin tirant fort pour tenter de retenir le moment unique et crucial de ce qui se nomme le déroulement mais tout tes morts mais tout est tout et tout est mort et la flèche tirée depuis longtemps la vois-tu dans ton corps en plein milieu fichée comme une corde qui te traverse en traversant le temps et l’univers










origine : http://macordaligne.wordpress.com/2012/12/14/tirez-un-trait-tirez-figuration-2/ avec commentaires

精度 — figuration nº2

par Claire @, vendredi 05 septembre 2014, 12:12 (il y a 3735 jours) @ cat...

oui, toujours aussi chouette...merci

精度 — figuration nº2

par cat, samedi 06 septembre 2014, 01:24 (il y a 3735 jours) @ Claire

c'est moi qui te remercie

精度 — figuration nº2

par Kel, mardi 09 septembre 2014, 12:39 (il y a 3731 jours) @ cat...

Aux lents demains qui rechanteront (peut-être)

Je suis pas devin, ni prophète… Depuis des ans, j’espérais chaque année le soulèvement populaire qui nous élèverait de notre fausse commune. Mais il n’est point venu soeur Anne, la barbe bleue à père noël, perdurent les murs murs. Tans de faux départs, d’illusions achevées, à se cogner la tête à tête, de quoi mille fois déchanter... Et ce flux sans résistance qui nous entraîne en flot continu vers le même sens... Bas, où il n'y a qu’impasse où ne plus aller, avec la crainte d’y rester – à tout jamais – immobilisé, bah. Ca fout la trouille, ça noue le bide d’y penser, se retrouver nez à nez face au néant, sans rien. Du quotidien, beaucoup de choses retenues, d’aspirations, on n’ose plus trop songer à mieux, on renonce au fond de soi, on oublie... On en est venu, au fur à mesure, à prendre la vie comme elle ne vient plus, à son coeur de corps défendant, cherchant sans se le dire une paix impossible réfugié dans le cloître de son petit univers isolé, et parfois quelques connaissances oui, aident un à passer les mauvais jours, mais il n’y a plus rien de rassurant les heures filantes à l'agonie... Vide dévide, on en vient à perdre sa vie, petite à petitesse. Tout autour, comme une gigantesque toile d'araignée sans fin s'étend, s'entend, cent ans, se dédoublant à l'intérieur de chacun pris au fil d’une sourde angoisse. Dans les derniers retranchements, on tente de se rattacher aux ultimes proches, des bouées, des branches, des fusibles, de se protéger, de faire abstraction de l’empire emprise, nous y sommes inextricablement mêlés, nous aimerions bien parfois nous en détacher, nous savons que c'est impossible, seul, on peut pas, on n’a pas le droit, ni le pouvoir, sinon de dire, nous ressentons un sentiment d’impuissance, d’abattement profond, intimement, jusqu’à la moindre de nos cellules étudiée, comme nos pensées, disséquées et manipulées sans précautions, objets de recherches dites innovantes en laboratoire... Il faudrait pouvoir leur échapper, protéger au moins notre coeur, notre esprit de leurs griffes. Les antirêves voudraient d’un monde parfait, comme Monsieur. Il se fait déjà tard... On se réveille ci et là par mouvements endoloris, éclats de rue sociale, on tente de résister à l'anesthésie de l’Anastasie intégrée, généralisée, mais le feu trop faible ne prend pas, vivent le temps d’une saison puis rendent les armes et meurent de trahisons de manque de convictions. Continuer d'y croire, comme une maladie d’amour animale, l’espérance est traîne et nous entraîne encore dans ses sous-bois sauvages, dans les recoins aventureux de nos désirs inaliénés, où nous puisons nos ressources à nos sources rebelles pour nous relever...  Tisser les réseaux en sourdine. Esprits camarades, de chants, de poésie et de visions, de silence, haïssons de concert la Grande Camarde de l’esprit asservi, bouleversons les constats figés, réenchantons nos idéaux à l’hunanimamitié retrouvée.