Solitude boulevard

par Écrire, mardi 10 mai 2016, 16:05 (il y a 3121 jours)

La solitude se rompt plutôt qu'elle ne se partage. On peut la distraire en lui payant quelques verres en compagnie, en lui diffusant un film, en l'entraînant jusqu'au bordel le plus proche, en lui narrant des histoires drôles ou en organisant des réunions Tupperware... La solitude n'est pas comparable. Insoluble, on le sait bien, jusque dans la société la plus chaleureuse. Sans doute, en première instance, ce qui distingue un être de ses semblables est le genre de solitude qui le travaille : dense ou molle, furtive ou lente, lisse ou râpeuse, distraite, insistante... Et comment à son tour il travaille ou ruse ce désert. Quelle est la couleur du sable au bout de l'épreuve...

La solitude, un bizutage pour chaque âge de la vie. Et quand il arrive que l'autre vous devine, termine vos phrases mieux que vous ne l'auriez fait vous même, vous pouvez croire que votre solitude est entamée, compromise, enfin, par l'âme sœur retrouvée. Et si par erreur (car ce ne peut être que par erreur), elle vous quitte un jour et que de surcroît, par folie (car ce ne peut être que par folie), elle ne revient pas, vous devez convenir que vous êtes doublé. Il s'agissait d'un deux sans rémission. Simplement, vous en aviez arrondi les angles et atténué les aspérités, redonnant ainsi corps au mythe de l'androgyne. Avec ce départ, cet arrachement, la solitude vous revient comme un boomerang en plein nombril lancé par la colère ricanante des Dieux. L'antique châtiment se rappelle à vous. Vous n'êtes plus qu'un. À peine. Éparpillé en vos restes. Chair et âme disloquées. Conduit au point néant. Modèle réduit de l'espoir. Et dans cette thébaïde, vous respirez encore, opprimé par l'instinct et par une appétence extrémiste à l'endroit des contes de fées hollywoodiens.

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