Fanny

par Vagabond vagabondant, samedi 28 mai 2016, 12:48 (il y a 3103 jours) @ Vagabond vagabondant

Fanny


Oui, drôles sont les pays que borde l'enfance,
le corps souvenu, sa vigueur, ce rêve où l'on glisse sur l'herbe
sans rien sentir que le retentissement, le souffle et les parfums
gazon tondu. Drôle la poésie
sans nostalgie qui périt sans périr où se perdent
au bord du parc, d'échos et d'odeurs, le garçon et la fille. Je ne sais plus
si l'on riait ou si, dans le plus grand sérieux,
l'on se tuait à la tâche, à la plénitude des gestes : jouer. Les corps rincés
par la joie, la rosée et le ciel, sous les yeux de nos mères, égarées, adultes, Fanny,
sous les nuages et les cris, près des bêtes qu'on ignorait
et qui parfois nous saisissaient, nous courrions ; on honnissait
les promenades ; on hennissait, brusques
chevaux, les tendresses qu'on savait alors quand on se chamaillait.
Nous courrions. Longions les grilles, je grimpais
vers les piques, vers le soleil. Crac. Homme, je chutais. De mon genou blessé, Fanny,
de ta robe terreuse, nos bras entrechoqués par les danses, les fictions,
par l'espace grand ouvert de la vie, l'on ne s'occupait : nous courrions. Et le tonneau, rouleur,
grondeur, de bois,
près de la toile d'araignée, faisait rouler, gronder les dieux des bois,
nous éjectait dans la rosée, qui s'asséchait : Midi sonne, je pleure, et pour me consoler
tu me cueilles des fleurs.

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