Business plan
Une mégapole américaine vue d'un ciel nocturne. Deux buildings modestes culminent à moins de cent étages. Des sirènes de police hululent dans le lointain. Des trains de marchandises roulent lentement vers un probable terminus. On s'approche d'une tour ronde à l'esthétique nulle et d’usage indéterminé. À son sommet, un homme guillotine un cigare cubain. À ses manières décontractées, on ne soupçonnerait guère qu'il s'apprête à expulser quelques âmes. Il s'empare d'un briquet. La nuit s'illumine d'une flammèche. Le fumeur a plus de soixante ans, mais il reste jeune car il porte une casquette à l'envers. Il aspire une bouffée du barreau, savoure un instant les effluves de tabac roulé à l'intérieur des cuisses humides d'une ouvrière nubile. Puis, le geste sûr, il apprête son fusil mitrailleur longue portée équipé d'une lunette infrarouge. Une seconde sulfateuse repose au poste de tir, près de la grille de protection qui ceint le sommet de l'édifice. En contrebas, un tapis de lumières jaunes et blanches avec quelques pointes de bleus et de rouges. Certaines sont mouvantes, d'autres fixes. Les couleurs sont assez mal réparties, mais il ne s'agit pas d'un tableau de maître. Lorsqu'il a terminé ses préparatifs, l'homme s'installe dans la position du lotus rose, ce qui produit un effet de contraste avec sa veste kaki. Une sorte de sagesse musculaire émane de son être immobile, tel un piège à loup. Le cigare s'éteint. Son propriétaire l'embrase derechef. L'air grésille faiblement. (...)