mes réponses à un questionnaire

par dh, vendredi 24 février 2017, 14:07 (il y a 2830 jours)

Recours au Poème affirme l’idée d’une poésie conçue comme action politique et méta-poétique révolutionnaire : et vous ? (vous pouvez, naturellement, ne pas être en accord avec nous, ou à être d’accord dans un sens diamétralement opposé au nôtre)

Mallarmé parle d’ « action restreinte » dans les divagations, et en effet Il ne faut sûrement pas s’attendre à de gros bouleversements politiques provoqués par un poème. Et quand bien même, cela prouverait-il la valeur, la justesse de ce poème ? Non. Il n’y a pas de preuve dans ce domaine et ceux qui prétendent en apporter sont toujours des imposteurs. Breton avait tort de vouloir mettre la poésie « au service » d’une quelconque idéologie, et cela a donné les horreurs que l’on connait. Ce n’est pas la poésie qui doit être au service de la révolution, mais au contraire la révolution qui doit être au service de la poésie.
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« Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve ». Cette affirmation de Hölderlin paraît-elle d’actualité ?

C’est parfois dans des périodes de crise où de grands désordres que surviennent de grands poèmes. Mais n’en faisons pas une loi. Est-ce que la poésie « sauve » de quoi que ce soit ? Méfions-nous des sauveurs, des mandarins-émancipateurs de toutes obédiences qui prétendent détenir le remède à tous les maux du siècle …
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Dans Préface, texte communément connu sous le titre La leçon de poésie, Léo Ferré chante : « La poésie contemporaine ne chante plus, elle rampe (...) A l'école de la poésie, on n'apprend pas. ON SE BAT ! ». Rampez-vous, ou vous battez-vous ?

Que ce soit dans le purgatoire de Dante ou dans « comment c’est » de Beckett, on voit des personnages qui rampent … Le serpent, l’un des animaux fétiches de Zarathoustra, reste collé au sol, près de l’humus, de la terre et des racines ... On a parfois pas d’autres choix que de ramper, de se cacher, de se conformer en attendant des jours meilleurs … Et je ne suis pas d’accord avec Ferré, on apprend aussi en lisant, en écrivant, en vivant. C’est même l’une des choses qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue. Quand à se battre, oui, contre l’inertie et une trop grande passivité, peut-être, mais pas pour la domination.
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Une question double, pour terminer : Pourquoi des poètes (Heidegger) ? En prolongement de la belle phrase (détournée) de Bernanos : la poésie, pour quoi faire ?

Bernanos comme Heidegger et Hölderlin (et Kafka) sont des écrivains empreints de spiritualité, voire de religiosité. Je ne crois pas pour ma part à la poésie comme outil de connaissance donnant accès à une perception plus vraie du réel, ni à une quelconque efficience émancipatrice et politique du poétique. Peut-être devrait-il être un chemin nous incitant, plus modestement, à développer un plus grand raffinement esthétique et moral, et ainsi à renoncer à la cruauté qui nous est propre ?

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