l'écriture, l'art

par Claire, mercredi 17 mai 2017, 20:07 (il y a 2748 jours)

Je voudrais rappeler ici une des fonctions de l'art, et donc de l'écriture. Certainement pas en faire la liste exhaustive, mais dire l'une d'entre elles, qui me semble absolument vitale :
l'art, l'écriture, sont un outil d'exploration du monde et de l'esprit humain. Pas seulement des côtés beaux, élevés, nobles, moraux, mais de tous les côtés, de la totalité de notre âme, et donc aussi ses côtés les plus laids, violents, destructeurs et mortifères. Les explorer, les exprimer, en donner une représentation symbolique, élaborée, sublimée par la forme, la justesse et le recul de la pratique artistique.

Pour les psychanalystes, nous avons plusieurs stratégies possibles face à ces côtés sombres et destructeurs de nous-mêmes, de notre inconscient :
soit les refouler, leur imposer le silence tant que c'est possible
soit les élaborer en les liant, les mêlant aux aspects plus positifs de notre psyché ;
soit les exprimer sous forme symbolique ;
soit les mettre en actes.
Il y a quelques domaines où une liberté absolue d'expression est de mise et même indispensable : la confession, la psychothérapie, et l'art (il y en a sans doute d'autres, ils ne me viennent pas à l'esprit).
Faute de ces espaces, le pire reste forclos, toxique et actif. Donc l'artiste, par la liberté absolue de son expression, est un de ceux dont le rôle est de dire le meilleur et le pire de nous. Toute censure équivaut à renvoyer dans les ténèbres ce qui pourtant existe, et ne manquera pas de ressurgir, le plus souvent dans des actes de haine. L'art, par ce qu'il dit, nous protège de faire.
Et ce n'est pas par hasard que toutes les tyrannies haïssent cette liberté, brûlent les livres, que tous les dogmatismes musèlent l'expression et les artistes. Leur manière à eux, c'est de faire, d'agir la haine, sous couvert de nobles sentiments.

Par ailleurs l'écriture ne cesse de nous interroger sur la question des "points de vue". Par exemple, dans le texte de Rémy où s'exprime un crocodile, s'interroger sur le terme de "négrillon" employé par cet animal, raciste ou non, est assez comique.


Bien souvent les artistes ont partiellement échoué dans leur effort de symbolisation de leurs pulsions. Sade a écrit des livres essentiels pour l'espèce humaine, pour lui permettre de reconnaître puis comprendre certaines de ses pulsions, mais c'était aussi un pervers sadique qui torturait ses servantes et méritait bien pour cela la Bastille. Je voudrais qu'on tente de discriminer les champs différents.

En tout cas, si jamais une censure morale venait à s'exercer sur le textes postés ici, je m'enfuirais immédiatement.

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