Phrases du long hiver
Ses yeux peinant à fixer ce qu’elle ne peut dire, mais pourtant désirant si fort de montrer à l’homme cet autre, dont elle veut le partage, même si la lumière fade d’un hiver jette son ennui par les vasistas jusqu’au cœur de la maison, ses lèvres qu’un frisson d’abattement et de faillite froisse et qui maintient au bord de la disparition une forme charnelle un tantinet charmante, c’est le souffle probable de son corps, c’est l’affolement ténu de sa pupille, c’est aussi sans doute la courbe bouffie de ses doigts relâchés entre ses cuisses flapies sous un tablier à fleurs, il est indéniable l’effort qu’elle puise d’un néant qui la compose et que nul regard, même pas celui fasciné et muet de l’être auquel elle s’adresse ne peut mesurer à son exacte valeur.
S’il venait par l’arrière de la maison, elle entendrait son hypothétique lourdeur, renversant les seaux et bassines de la buanderie que les carreaux embués n’éclairent pas là où il pourrait arriver, car c’est fatalement par cette souille incertaine que celui dont elle parlait avant impossiblement, peut aujourd’hui forcer l’enceinte de la maison, déjà elle perçoit de ses gestes le bruitage duquel un visage devrait se construire, mais indéfiniment le retardement s’avère si délicieux, que le mouvement de l’arrivant est latent pour eux deux qui sont encore à espérer qu’un capharnaüm de buanderie fera barrage à l’entrée du redoutable.
La matinée gelée de l’hiver est occupée à souhaiter tout ce qui pourrait en rompre la glaciale solitude.
(à suivre...)
Fil complet:
- Phrases du long hiver -
Périscope,
16/10/2017, 10:56
- Phrases du long hiver - sobac, 16/10/2017, 11:39