Phrases du long hiver (suite 3)
« Femme seule cherche jardinier expérimenté » on peut lire parfois dans les annonces d’un Rustica. Phrase semée entre camélias et tulipes. Une offre comme ça, pour la saison qui vient. Ça se pourrait.
Voici.
Mais c’est un homme de labour, comme un cheval, que le costume étreint, ses reins boursoufflant le tissu, un vomis hirsute de poitrail de la chemise gerbant, les manches à l’encolure de ses poignets libérant la pogne, il se tient dressé dans l’embrasure, le toit de la maison devenu vassal de ses suzeraines épaules, avec le mépris d’un hobereau improvisé, sa langue de feu, racloir à moustaches qu’il arbore drues tel un chiendent, il se défroque, chagriné de sa condition, et l’on voit le couple palper le spécimen, l’hiver froid se réchauffer dans une fournaise de croupe, les mains se ragaillardirent dans le bombé des flancs, les visages s’empourprer sous l’alizée odorant d’un balancement de queue à tous crins, les pognes de l’homme piaffent desquelles s’exhalent des relents de purin et bouse au contact des épidermes blanchâtres, porcelaine de luxe qui s’exhibe et qu’on frotte à l’invité agreste, quand une grêle violente vient à marteler la charpente, grincements des poudres, un essaim de chauves-souris perturbées dans la maison déploie son ciel cauchemardeux, s’en prend aux chevelures, crinières ou crin brossé, dans la robe offerte du vivant, se niche, pantouflardes, dans une aisselle duveteuse, sous le tambourinement lancinant des grêlons, dans le halètement divin des hommes, l’éructation globale de leurs malheurs, qu’une maison qui tangue ne pourra souffrir davantage.
La nuit durant ce temps se prépare.
(à suivre...)