L'invité

par Périscope @, mercredi 28 février 2018, 17:36 (il y a 2461 jours)

L’invité

Assise sur le canapé, elle resta bouche bée, essayant de comprendre ce qu’il venait de lui demander, elle l’avait attendu depuis le début de l’après-midi, elle avait acheté une bouteille de champagne, elle ne le connaissait pas depuis longtemps, mais lorsqu’il était venu travailler dans son groupe, elle sentit confusément qu’elle ne pourrait pas en rester là avec lui, qu’il faudrait en apprendre davantage sur lui dont elle savait qu’il n’habitait pas la ville, qu’il vivait probablement dans une région du sud avec une femme charmante et des enfants pétillant de santé et que s’il venait exercer son art dans une banlieue grise, c’était parce que la beauté des pays du sud ne lui permettait pas de vivre et que malgré le bonheur qui l’unissait à sa femme et ses enfants, les nécessités de son métier le contraignaient à se séparer d’eux, juste le temps de gagner l’argent qu’il lui fallait pour payer le lotissement et satisfaire les besoins de sa femme exigeante et permettre à ses adorables enfants de recevoir une éducation qui ne soit pas celle des indigents, elle lui avait demandé à la fin de la séance s’il était disposé à venir boire un verre, un jour, chez elle, à six heures du soir, histoire de se changer les idées et d’échanger un peu plus longuement sur la culture, la littérature, les arts en général, parce qu’elle-même était férue de toutes ces chose qui aidaient à traverser la vie plus agréablement, et à oublier les peines qui assombrissent parfois l’enfance en laissant des traces à l’âge adulte, jusqu’à entraîner la personne à entreprendre des choses insensées comme par exemple inviter un homme qu’on connaît à peine, à le faire asseoir sur son canapé, dans un intérieur qu’on aura rangé exceptionnellement pour lui, afin de ne pas lui donner prise sur notre intimité, découvrir des photos personnelles, des vêtements en désordre, des souvenirs de famille qui en diraient trop sur notre propre histoire, et de ne laisser en sorte que le strict nécessaire, indispensable à la visite d’un inconnu qu’on veut découvrir sans que des dommages collatéraux risquent de nuire à l’environnement privé où on lui ouvre une porte en sachant que celle-ci lui sera ouverte et ne le demeurera qu’à la condition que l’inconnu ne transgresse pas les limites de la bienséance, car dans le cas contraire il lui sera recommandé immédiatement de retourner là d’où il vient.
Donc elle ne referma sa bouche que pour expirer longuement et reprendre son souffle, ce qui ne signifiait pas qu’elle acquiesçait aux propos qu’il lui avait tenus, et la question implicite qu’ils contenaient, d’ailleurs était-elle certaine d’en avoir compris réellement les termes...

(2ème et dernière partie à suivre)

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