[...] suite

par RG, mardi 09 décembre 2014, 17:51 (il y a 3640 jours)

J’avais lu que Beckett, durant ses études, avait assisté à un séminaire de psychanalyse sur la dépersonnalisation et qu’au sortir de cette conférence, il avait pris la décision de n’être personne. Que le bonheur, pour lui, c’était d’être mort un peu. D’être un peu absent du lieu où il se trouvait. De toutes celles qui m’habitaient, cette image était la seule qui m’enchantait. Cet homme minuscule, dans un amphithéâtre géant, en train de se dire que tout est fini. Qu’il n’y aura peut-être plus jamais de vie qui viendra, plus jamais de vie en lui. Et qui se met à écrire, parce que cette question l’angoisse jusque dans ses rêves. Après ça, il avait dû vivre des choses qui n’étaient pas sa vie. Il devait lui arriver d’entrer dans une pièce et de s’apercevoir qu’il n’était pas ça, qu’il vivait ça mais que ce n’était pas lui. De vraies scènes de la vraie vie qu’il vivait vraiment mais qui ne lui appartenaient pas. Comme un muscle qu’il aurait oublié de solliciter et dont la manipulation s’avérait désormais douloureuse. Le muscle et l’angoisse qui va avec. Pas comme une ancienne peau qui aurait glissé, non. Plutôt comme un bout de viande recraché.

Fil complet: