Saignée
que m'est-il aujourd'hui loisible d'exprimer?tout semble s'évaser, et de l'artère ouverte
dans les Chairs rien n'est rien que saignée infinie
saignée de peu de sang, peu de sucs, de peu d'âme
religieuse saignée, et chez moi la lumière
ressemble au trop-audible, au saturé, au gris
à la mousse asséchée qui déborde des pierres...
la Nature... – à quel point en sommes repoussés?
à quel point la rumeur sous le duvet des sols,
l'odeur que jupe un geai à la rivière jaune
la torpeur irradiante où la nuit se reflète
près des cyprès que les amants s'inventent
pour y gémir... – à quel point tout cela,
des fonds où nous tenons, comme d'une origine,
s'éloigne? avec cela, c'est la vie primevère,
grossière poéta mais poéta quand même,
qui dégage. le vent, possible d'en rêver?
une habitude en trop, peut-être le reflet
surheurté du réel dans le fluide visible...
c'est ce que nous dirons – avant de s'en laver...
et la vie primula se signe et part, baillant
comme lettre d'adieu, la dernière
avant celle qui suit – on la dira "d'Amour"
en serrant fort sa peau.
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