Vieille ordure
Je ne sais pas comment te dire, tu sais, je t'aime. C'est trop tôt ou j'en sais rien, quelque chose comme ça. Je me répands dans la misère, je redeviens malade, je redeviens niais et je n'ai plus rien à dire. Ménageons la chèvre et le chou, c'est encore la seule chose qu'au fond de ma détresse, de ma misère, au fond de ma misère, j'arrive peut-être encore à dire. J'ai pensé que je pourrais me loger une balle dans le cœur. J'ai l'impression d'en avoir déjà reçue une, une balle spirituelle, et que c'est, peut-être, ce qui t'a plu. Parce que je suis un homme, parmi quelques autres, à la balle dans le cœur. C'était un soir, je ne sais plus quand, juste avant de te connaître, juste avant tu m'entends. Je sais que tu as peur que je ne sois qu'un pauvre type. Un type qui va voir à droite et à gauche, comme ça, juste pour se rassurer, juste pour se soigner un peu de sa blessure. Je ne veux pas, tu m'entends, je ne veux pas. Je te veux, toi, et je suis prêt à prendre une deuxième balle si j'ai le cœur assez gros. Ou alors ce me sera fatal. J'irai chez l'outilleur, je prendrai un beau pistolet, un qui ne va pas me rater, et je te jure que je me la logerai plutôt que d'aller voir à droite et à gauche, comme ça, juste pour se rassurer et me soigner un peu ce gros cœur qui n'est pas si gros, qui est énorme. Qui ne peut peut-être pas accueillir deux balles. Qui peut peut-être être broyé qui sait. Et qui veut dire, mais il ne sait pas comment, il a peur, qu'il t'aime et que plus il a peur plus il t'aime, qu'il ne sait pas par où commencer pour nous rendre heureux. Il sait qu'il a jamais vécu ça, ni des yeux pareils. On ne sait plus si tu es un chat ou une femme, on ne sait plus où Dieu est allé chercher tant de beauté, on ne sait plus pourquoi même éventuellement on aurait mérité une pareille chance. On ne sait plus qui de nous deux a fait l'un pour l'autre mon regard ou le tien. On ne sait plus pourquoi, mais mon Dieu, nous sommes là.