lilalou
je voudrais écrire des poésies, mais je sais pas sur quoi écrire mes poésies :( je crois que c'est le confinement qui fait ça (et l'un, et l'autre). alors je lève une foule de personnages comme on ne se lève pas de son strapontin dans le métro, comme on ne tourne pas sept fois sa langue dans sa bouche, comme on fait tout ce qu'il ne faut pas faire- et qu'on le fait pour cette raison. un personnage se tartine comme de la confiture sur la tranche de pain de ma phrase, et un autre fait passer ses opinions entre ses doigts comme le chapelet du prêtre, et un autre suspend ce collier à ce qu'il va dire, et le met au cou de quelqu'un. voilà ce quelqu'un bien embarrassé. personnellement, je ne voulais rien dire. le parc montsouris est toujours là quand je me promène, à la même place, ce que font généralement les choses inanimées: eh bien ça me remplit de joie. quelle politesse! toujours là où on l'attend. quelle ponctualité! merci, vraiment. merci les trottoirs, les voitures, les immeubles, les passants, les autoroutes, les stations services, le café de trop qu'on boit quand même, la pause au cours d'un covoiturage trop long, les sujets de conversation qu'on promène dans le langage comme son regard sur la route, sans conviction, le soleil qu'une branche découvre lorsqu'un peu de vent la remue (mais si peu, si pauvre!), merci la pénultième cigarette, merci les miroirs, les glaces, les reflets, merci mon corps, merci vos corps, merci le printemps, merci les paysages dépliés et repliés comme une serviette rangée dans la poche intérieure de ses pupilles, et ce soleil de très précisément vingt-et-un-degrés centigrades, qui se couche sur le sentiment de sa course, coeur de lièvre qui palpite, et qu'on sirote avec une paille.Fil complet: