Extraits

par Florian, dimanche 18 janvier 2015, 23:39 (il y a 3599 jours)

Je vous parle d’une voix résignée, d’une voix blanche, comme un paysage d’hiver, une motte d’herbe esseulée au travers d’une neige persistante, avec un rire qui se serait engorgé lui-même. C’est une saveur de nuit, une nuit profonde, engloutie, un alcool dissipé, laissant un désert d’ivresse, un désert dépeuplé, pour reprendre la formule de Beckett dont on s’est interrogé sur le sens. Mais le sentiment désertique est à double tranchant. Il n’est pas uniquement un vide à combler, il est le produit d’une alternance, alternance qui lui a laissé sa place, alternance, dans toutes les dimensions, les situations, entre deux sortes d’extrêmes. Le désert est tout autant la plus grande félicité que le néant. C’est dans les déserts que se sont reclus les plus grands chercheurs d’euphorie, comme on y a reclus des condamnés.
Le désert à vrai dire n’est pas un lieu précis, il est dans sa seule acception géographique n’importe quel lieu. Le désert est présent dans les capitales, et je ne dis pas là un poncif. Il est tangiblement présent, du moins dans les capitales occidentales. Il est arrivé à tout le monde d’être physiquement seul dans les artères d’une capitale, non pas seul en lui-même, mais seul dans les rues, un dimanche, la nuit et ce sentiment de désertion l’a d’autant plus frappé qu’il n’était pas tout à fait seul, mais inclus dans un foisonnement de logis habités. Peut-être ne l’a t-il pas remarqué, peut-être cela est passé inaperçu. Cette indifférence prouve que le désert a toujours existé, qu’il a dominé bien avant les agglomérations.

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