Des murs encore des murs
Le mur cramoisi où tu pisses
A l’aube on les conduit et un à un on les fusille devant le mur
Par les fentes ils se passent des mots doux
C’est par une accumulation de pierres sèches que le mur tient
et qu’il borde les routes et encercle les vaches
La chaleur de ton urine entretient les murs et fait fuir les lézards
Devant lui je me lamente, il était le temple du Saint des Saints
Dimanche on projette des images de perlimpinpin sur le mur luisant
des pensionnats
De l’autre côté murmurent ou s’étranglent des mots que je ne devrais pas entendre
Sur les arrêtes de pierre poussent la saxifrage qu’aucun mur ne peut arrêter
Les murs ont l’avantage d’admirer les braguettes
ou le colombin mou que l’espèce humaine dépose
Sur un chantier ce qui le caractérise c’est l’élévation première d’un mur
Ils sont des milliers à se cogner à hurler à se masser au pied de qui empêche leur rêve
Merci murs de construire ce que depuis si longtemps j’amasse
Un soir de septembre je les cueille dans les buissons et je croque leur acidité sauvage
Dans un coin je suis au piquet et je médite pourquoi le maître m’a donné
un coin de mur pour horizon
Sur leur paroi on déchiffre la naissance du monde
mais aussi la parole ultime du prisonnier en lettres de sang
Entre quatre pans de mur
nous avons jetés notre couche et dessus nous nous sommes aimés
Les héros de l’Affiche Rouge tombent devant lui
Il mesurait 155 kilomètres de long
et moi avec mon même pas deux mètres
je le transperçai le 9 novembre 1989
Dans un mur de brume
on cherche des mains, elles se touchent,
jamais on ne verra de visages
Alors on fait des concours,
à celui qui pissera le plus loin
aucun mur ne peut nous arrêter