Les scarabées (suite et fin)
Les scarabées
Tu serais un garde-chasse marchant dans la forêt, dans la profondeur de la forêt, sur une pierre tu chuterais, sous la pierre les scarabées seraient les témoins de la chute d’un garde-chasse sur une pierre de la forêt, les gouttes d’eau d’un nuage accompagneraient ta chute qui ferait se sauver les oiseaux vers la vallée, les rameaux obscurs recouvrant l’herbe profonde étoufferaient ta chute, disperseraient les atomes de ta chute, chaque atome est une étude du monde, chaque atome te ferait entendre un bruit de feuille, dans chaque atome sommeille un scarabée, les scarabées te mangeraient toi le garde-chasse qui fuyait les hommes en marchant dans la forêt profonde où tu aurais chuté sur une pierre, réveillant les scarabées, chaque atome est un dieu où loge le nid du vent dans un ciel calme couvert de plumes blanches, dans les atomes de ta chute s’envoleraient les bruits du monde sans parfum, dans le bruit de ta chute, toi le garde-chasse tu ne voudrais qu’un silence d’oubli, le silence de la haine et son fiel sans parfum, une haine qu’on verrait faire frissonner le lierre dans les bois, une haine debout dans l’antre sourd des ravins, une haine au creux des sources ou derrière des buissons où elle se cache, toi le garde-chasse tu aurais marché dans la forêt, chuté sur une pierre, dans la solitude des taillis tu chercherais le chêne puissant, tu aurais marché longtemps dans la forêt sans te coucher sur la mousse, tu aurais chuté sur les pierres que recouvre la mousse et dans l’ombre des pierres des scarabées noirs te mangeraient, dans leur mystère se trouve un sépulcre de branchages où s’abritent les gardes-chasses, dans le mystère des scarabées tu ressusciterais sans jamais t’endormir
Quand la mer tend son miroir, les gardes-chasses y contemplent l’infini, chaque lame est un gouffre ou se perd l’image d’un garde-chasse, sans forêt meurt le garde-chasse, au sein du vide, sans bruit et sans rumeur écoutons sa plainte redevenir sauvage, l’indomptable en lui, le ciel ténébreux qui l’abîme, le miroir infini de la mer qui l’abîme, et dans l’intime du garde-chasse couve une richesse, un secret que des siècles innombrables déposent qu’on ne peut combattre sans que s’érige l’ombre des remords, même dans le miroir de la mer, où carnage et mort sont mêlés, le garde-chasse reste ce lutteur infini, le garde-chasse ce garde-fou éternel que reflète le miroir infini de la mer