A force de fragilités

par Poème d'anonyme, mercredi 01 avril 2015, 10:12 (il y a 3527 jours)

Lorsque le corps n'est pas lui fragile
et quand on a la chance de pouvoir
marcher, dormir sous un toit, manger à sa faim...
Fragilité ce peut être se sentir brisé quand les coups ont été rudes.
C'est avoir besoin des autres.
Ne plus pouvoir tenir sans être aidé, se sentir épaulé.
Fragilité comme un sentiment, perdre confiance en soi, perdre estime
ressentir la précarité de la vie chaque jour
vivre seul, ne pouvoir vivre seul
une constante avec laquelle il faut bien accepter de vivre.
Fragilité avec sentiment d'abandon.
Culpabilités et culpabilité aussi de ne pas
de ne plus y arriver.
Fragilité d'espoir aussi, de retrouver équilibre, de guérir des blessures, de réparer.
Fragilité des espoirs.
Fragilité de savoir ne pas pouvoir
écrire d'avantage, fragilité de choisir d'écrire
ce qui vient direct. Des causeries.
Laisser les mots tranquilles, les pensées aller venir
ne souhaiter faire mieux ni plus que possible
sans chercher à combler les lacunes avec du vide existentiel.
Écrit avec ce que tu es,
avec ceux et celles avec qui tu a vécu,
continue à vivre.

En solitude - ou pas

par Poème d'anonyme, mercredi 01 avril 2015, 10:30 (il y a 3527 jours) @ Poème d'anonyme

Tu te sentais seul avec tes pensées grises un hiver
une âme solitaire en un cœur prisonnier.
(Mais le passé est-il vraiment le passé ? Quels temps fait-il ?)
Tu n'y arrivais plus.
Porter le corps quand le cœur n'y est plus.
Des gens t'aiment pourtant
toi aussi...
Mais à l'intérieur comme un chant de ruine
montant de la plainte
dans ton appartement
la joie n'était plus là
tu te sentais descendu.
Partie avec elle
avec ta jalousie en même temps
tu pensais encore à elle
tu te disais que tu ne l'aimais plus
tu étais persuadé qu'elle ne t'aimait pas.
C'était sans doute faux...
Tu étais seul à seul
dans ton appartement
- avec les miroirs, et avec les morts
et tu ne voyais pas d'issue. Tu hésitais...
C'était comme juste avant elle
tu n'en voyais plus non plus
à part la fenêtre...
Dehors les oiseaux chantent
tu aimes les écouter
mais tu n'y arrivais plus
tu avais envie de t'en aller
partir en chant
te jeter en l'air
par la fenêtre les rejoindre,
tu ne savais plus rien, ni où ni comment.
Des gens t'aiment pourtant
toi aussi...
Puis tu t'étais mis à dessiner au rythme de ton cœur et de ton esprit
comme tu respires
pour ne pas mourir.

Tu regardes par la fenêtre
tu écoutes les bruits les voix les pas
le chant des oiseaux...
Tu te souviens bien, des bruits bizarres venant du dessous
les portes qui claquaient
les partouzes des voisins nouveaux
comme le beaujolais
telles des orgies de baise
avec des rires et des cris en jouir
des paroles fortes comme te moquant, comme complotant
et cette silhouette brune vue de dos s'en allant au petit matin décoiffé
comme deux gouttes d'eau, jusqu'à ce qu'elle coupe de côté pour descendre par l'escalier de pierre
tu te disais que c'était elle à tes fantasmes
- salut petit bonhomme de gingembre fluorescent, glissé dans la chevelure, cligne
- adieu plénitude amoureuse, sois heureuse
elle s'en allant en jupe et talons aiguilles la culotte trempée
tout était présent à rebours pour te torturer l'esprit
à te tromper et à te perdre te descendre au fond d'un puits noir
mais c'étaient seulement encore des coïncidences ! Pas une fatalité.

En bas les poubelles sont ouvertes, les rats rodent toujours autour.
Ils ne sont pas mauvais.
Nuit et jour tu venais ainsi à la fenêtre
tu regardais le bout de ciel et par-terre
en fumant des cigarettes
il n'y avait plus que les oiseaux à jouer la musique nature.
C'est miracle qu'ils chantent encore, il n 'y a presque plus de jardin
seules les terrasses et les toits ocres
- et la Cathédrale ressemble toujours étrangement drôlement à un soldat romain
les luttes sont sans doute silencieuses
parfois des éclats de cris, passent les touristes
tout semble changer en permanence
ils ont coupé beaucoup d'arbres
ils ont chassé beaucoup de pauvres gens. Une ville nouvelle.
Tu vis au centre d'un quartier assiégé depuis des lustres, bombardé, trahi, piétiné, bafoué - l'Hôpital Dieu est un Hôtel Incontercontinental de Luxe 5 étoiles !
pourquoi étais-tu resté ainsi ? Comme immobilisé, tu n'as finalement pas bougé du Panier.
Tu t'étais peut-être arrêté le temps d'aimer, et puis partout tu t'es dis qu'il y a des mêmes scènes, mauvais théâtre d'ombre, des lumières clinquantes
où l'on fait semblant de vivre.
Soupire, l'amour semble s'être évaporé en fumée, comme dans une flambée, une histoire qui n'en finit pas de se terminer - tu y penses encore
quelle illusion pour continuer ? L'alcool était un faux ami que tu as quitté.
Ainsi tu pourrais te sentir libre
tu vivrais tu irais en respirant, tu continuerais à vivre ouvert - malgré les affres, au bénéfice du doute embrassé. La vie est telle un baiser !

En solitude - ou pas

par (...), mercredi 01 avril 2015, 11:25 (il y a 3527 jours) @ Poème d'anonyme

(je ne suis que subversion)

En solitude - ou pas

par julienb @, mercredi 01 avril 2015, 12:18 (il y a 3527 jours) @ Poème d'anonyme

Rien à ajouter au commentaire de 411.
Je préfère encore ce second poème.

A force de fragilités

par 411, mercredi 01 avril 2015, 10:50 (il y a 3527 jours) @ Poème d'anonyme

Franchement, c'est beau. En tout cas ça m'a ému. Une poésie pleine de sens, simple, sans fioritures, un ton très doux, qui touche. Et cette fragilité qu'on connait tous, qui est aussi la capacité de ressentir celle des autres. "Continue â vivre" oui, merci, tu m'as aidé.

A force de fragilités

par (kelig), mercredi 01 avril 2015, 12:13 (il y a 3527 jours) @ 411

Ton commentaire me fait beaucoup plaisir.

A force de fragilités

par 411, mercredi 01 avril 2015, 14:16 (il y a 3527 jours) @ (kelig)

De rien. C'est sincère.

A force de fragilités

par dh, mercredi 01 avril 2015, 12:55 (il y a 3527 jours) @ 411

là j'avais envie de dire quelque chose de désagréable à anselmet,

et puis je me suis dit "à quoi bon ?".

A force de fragilités

par julienb @, mercredi 01 avril 2015, 13:12 (il y a 3527 jours) @ 411

411, tu es Pierre Anselmet ? J'ai été impressionné par une bonne partie des "Nerfs sauvages"...

A force de fragilités

par dh, mercredi 01 avril 2015, 13:29 (il y a 3527 jours) @ julienb

moi j'ai lu "les nuages" quand il est sorti. ça ne m'a pas déplu, mais je n'en garde pas grand chose.

Les nuages sauvages

par 411, mercredi 01 avril 2015, 14:32 (il y a 3527 jours) @ dh

Merci julien. Les nerfs sauvages c'était il y a longtemps, oui, le tout premier. L'avais écrit en 1 ou 2 mois, une période dure. C'est très bancal mais le souffle est continu, et ça tient, malgré tout.
dh: je ne sais pas quelles sortes de de choses désagréables tu voulais me dire mais c'est pas grave, je me dis qu'au fond tu m'aimes bien. Ca m'aide à tenir le coup. Ca me calme, le soir, quand l'obscurité étouffe mon regard et ma voix. Savoir que tu penses à moi me comble et me rassure. Oui Denis, tout ça tout ça. Bah. Moi je t'aime bien en tout cas.

Les nuages sauvages

par dh, mercredi 01 avril 2015, 14:39 (il y a 3527 jours) @ 411

en tout cas j'ai lu ton livre en entier.

si j'avais trouvé ça nul je n'aurais pas été au bout.

Les nuages sauvages

par julienb @, mercredi 01 avril 2015, 15:53 (il y a 3527 jours) @ 411

Oui, c'est bancal, en tout cas un peu hétérogène ; mais c'est très fort, et souvent très beau.

Les nuages sauvages

par dh, mercredi 01 avril 2015, 18:32 (il y a 3527 jours) @ 411

salut pierre, je viens de relire "les nuages" et j'ai bien aimé. l'écriture, c'est ce qui m'intéresse le plus dans ton projet. tes trucs de rap et musique électro, bof, ça me laisse froid. mais ton recueil est bien. du moins à mon goût.

Les nuages sauvages

par dh, mercredi 01 avril 2015, 18:35 (il y a 3527 jours) @ dh

à mon sens, l'écriture doit suffire. pas besoin de faire du vroom-vroom à côté.

Les nuages sauvages

par dh, jeudi 02 avril 2015, 09:12 (il y a 3526 jours) @ dh

pierre, tu n'es pas fâché j'espère ?

Les nuages sauvages?

par 411, jeudi 02 avril 2015, 12:21 (il y a 3526 jours) @ dh

Non non, pourquoi le serais-je? Je sais bien que mon point fort, c'est plutôt l'écriture. Maintenant je ne comprends pas bien: tu as aimé, ou pas, les Nuages? Car tu as tout à fait le droit de dire que ça te laisse froid. C'est que tu l'as relu depuis?

Les nuages sauvages?

par dh, jeudi 02 avril 2015, 14:23 (il y a 3526 jours) @ 411

je l'ai relu hier et je trouve ça très bien.

ça

par Poème d'anonyme, jeudi 02 avril 2015, 08:58 (il y a 3526 jours) @ Poème d'anonyme

ça n'a l'air de pas y toucher
ça n'a l'air de pas grand-chose
c'est tellement peu
c'est minuscule
c'est comme un grain avec de la poussière de lumière
une cellule à l'intérieur il fait drôlement clair et limpide
c'est doux et tranquille
c'est paisible ça avance en soi
ça va de soi et ça vient de soi
c'est pas beaucoup et en même temps c'est tout
c'est magique
c'est naturel
ce n'est pas incroyable
c'est vivant
c'est un ver de terre un plancton un corail
et je suis à l'intérieur
et je fais des trous dans la terre
pour respirer pour faire vivre la graine
pour les plantes
et je m'enfonce dans le sable
avec une vive
je serpente – ma langue est double
je vis d'amour et d'eau fraîche
les serpents et les rats sont mes amis, les oiseaux aussi, et puis les fourmis
les termites, les virus, les bactéries, je suis de l'eau qui coule
et je suis le photon qui donne la vie
le photon du soleil de la lune
je suis double et je vois double en une vision – d'un trait
je m'efface maintenant et laisse la nature oeuvrer.

Verbe herbe au pied d’arbre

par (kelig), vendredi 03 avril 2015, 08:35 (il y a 3525 jours) @ Poème d'anonyme

Arbre, à l'herbe où court souris verte,
dis, vaudrait-il mieux ne pas être né dans une ferme si
ne pas avoir grandi au milieu des poules et des cochons si
tu souhaites vivre écrire herbe arbre, vaudrait-il mieux – beaucoup non
n'être animal politique non anti-atomique si
pour père un paysan de culture bretonnisante
pour mère une féministe nature
pour famille deux frangins animant les enfants
cultivant le goût des plantes
des proches loin que tu aimes pour famille planète
le sentiment d'être frère si tu te livres avec la vie de la vie ne cherche pas de livre, dis, arbre
recueille lent si, vaudrait-il pas mieux être atomisé vide ?
Pas avoir pour pays une contrée trop belle ni trop vivante
ni trop particulière ni trop fière
vaudrait-il mieux – verbe herbe vivre écrire
pas être de Bretagne ni de France ni de Corse, pas non plus Africain ni Amérindien ni d'ailleurs
mais n'exister vraiment nulle part peut-être arbre, à être minéral.

N'avoir pour langue langue tordue de douleur, langue vivace
vaudrait-il herbe arbre vivre écrire mieux ne pas avoir de racine ni de sève.

Avoir l'argent, cuillère en or dans la bouche
avec le matériel et tout le tralala
l'air du temps à consommer sans gêne
coeur de métal sans souffle dans les cuivres.
Pas avoir de matière ni de caractère
pas être attaché à quelqu'un n'aimer personne
pas avoir de lien rien vouloir dire si
à présent qu'écrire ce serait devenu moins que du vent sur le papier
de journalistes vendus pour taire les non-dits en mentant les faits.

Si malgré tout tu résistes verbe herbe arbre vivre écrire
tu persistes dans les signes malgré les pieds dans la glaise et la tête en l'air.
Malgré toutes les anomalies de la nature d'aujourd'hui.



Vivant d’herbes et de feuilles
– même quand tu parais léger
tu restes aux pieds d'arbres issu d'un grand arbre généalogique
de nos histoires. Au Souffle des ancêtres.