la couillonnade ordinaire

par dh, lundi 13 avril 2015, 10:18 (il y a 3515 jours)

Chantant "avec beaucoup d’impersonnalité", Philippe Beck sait "l’art d’être dans la poésie". En forgeant le néologisme d’"impersonnage", il a nommé la métamorphose du poète en "dieu humain général". Sujet lyrique vigilant, sujet critique, à la fois effacé et dilaté aux dimensions du général dans le particulier, le poète aère musicalement les rapports entre les hommes et parle à son époque, y intervient. L’œuvre beckienne a une valeur inaugurale, sans pour autant faire table rase du passé: par sa tenue classique, sa relecture des sources et sa traversée des voix, il rénove le lyrisme. "Forme continuante", cette poésie fait retour sans répéter, elle reprend: reprise du vers, des genres et de leur hybridation savante (conte, élégie, idylle, poème didactique), des indécidables racines populaires, fabuleuses et fabulistes, réfection du maniérisme et/ou du baroque. "Réden", dans Déductions, explore ainsi la part de paradis possible pour notre "rhumanité", dans une réflexion sur l’Histoire qui restitue la poésie à sa vocation anthropologique. La musique de l’homme rejoint dès lors une disposition éthique future, déploiement de sens dans une lecture du temps. Enseignante en densité, elle est littérature de la littérature: la lyrique beckienne enveloppe une poétique à déployer ensemble.

Ce colloque s'efforcera de montrer en quoi une poésie intempestive dans sa singularité, ni "contemporaine" au sens vague, ni néo-classique, relance, par sa nature polyphonique, l'inquiétude et la pulsation de Maintenant. En interrogeant la notion neuve et rigoureuse d'un "impersonnage poétique", il éclairera donc le possible rôle et la puissance d'une poésie dans la rudesse de nos vies.

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La pensée-poésie de Philippe Beck

Il n’est pas surprenant que Philippe Beck ait placé son nouveau livre sous le haut patronage d’Arthur Rimbaud, ce grand éveilleur de langage. «Un souffle ouvre des brèches opéradiques dans les cloisons», écrivait l’auteur d’une «Saison en enfer» dans cet extrait que cite Beck en ouverture de son nouveau livre. Auteur d’une oeuvre déjà considérable, salué dans le monde entier comme l’un des plus grands poètes d’aujourd’hui (un colloque sur son travail s’est tenu l’année dernière à Cerisy), Beck a forgé, au fil de ses textes les plus importants, une pensée-poésie qui doit autant à la science-fiction de Philip K. Dick, à la critique de Léo Spitzer, aux apories visuelles de Rothko qu’à Ozu (le cinéaste) ou Messiaen (le compositeur).


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Textes difficiles, sans doute, comme cimentés de références nombreuses qui rendent leur escalade problématique. Mais, arrivé là-haut, une bonne surprise attend le lecteur: qu’un texte aussi opaque puisse être aussi beau. Avec Beck, la poésie française n’a jamais sonné de la sorte. Suite de questions comme celles d’un enfant découvrant l’univers, noms communs changés en noms propres (non pas «la peinture» mais «Peinture») pour obliger la parole à signifier autrement: Beck invente une langue nouvelle, abstraite et matérielle à la fois, comme si Mallarmé s’invitait à un banquet donné par Rabelais en personne. A la manière de Boileau, il examine les divisions au sein des arts majeurs (musique, danse etc.) et livre un art poétique planant qui opère un va-et-vient fertile entre théorie du vers et pratique de l’émotion.


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Auteur d’une oeuvre considérable, salué dans le monde entier comme l’un des plus grands poètes d’aujourd’hui, Philippe Beck a forgé, au fil de ses textes les plus importants, une pensée-poésie qui doit autant à la science-fiction de Philip K. Dick, à la critique de Léo Spitzer, aux apories visuelles de Rothko qu’à Ozu (le cinéaste) ou Messiaen (le compositeur). Philippe Beck invente une langue nouvelle, abstraite et matérielle à la fois. Il examine les divisions au sein des arts majeurs (musique, danse etc.) et livre un art poétique planant qui opère un va-et-vient fertile entre théorie du vers et pratique de l’émotion.

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