après-midi (s)

par Claire, mardi 14 avril 2015, 17:03 (il y a 3513 jours)

J’ai ces endroits en moi. Il me suffit de m’asseoir sous un arbre ou dans la maison, sans allumer les lampes dans la chute du crépuscule. Ces endroits sont toujours là, très loin, dans le temps et l’espace. Ce sont des endroits où l’on court, où l’on travaille toujours ensemble. On ne parle pas tellement, les mots font un bruit aussi important qu’une chute d’eau, comme la série de chutes d’eau le long d’un chemin de moulins, dans une petite ville italienne. On marche ou on court selon l’âge qu’on a. Courir est meilleur et même pousser ces cris d’enfants dans la poursuite, dans l’air transparent du soir. Mais la nuit tombe, bientôt on va pouvoir être dans le noir.
On cessera de courir. Etre enfants c’est pour oublier tout ce qu’on est, tout ce qu’il faut faire. S’asseoir en tailleur dans la poussière et se raconter des histoires de magie, rire bas, dessiner. Savoir que l’été commence à peine et qu’il ne finira jamais celui-là.




.............................................





Il y a la ligne des cheveux coupés sur la nuque, ligne ondoyante, photographique. il y a l’usine aux murs presque aveugles, le poids que c’était sûrement d’y entrer – le tunnel des aubes d’hiver, glacées.
il y a ce qu’était la musique classique quand j’apprenais, si mal, le piano.
il y a les arbres de judée maintenant : juste avant l’éclosion complète, leur mouvement et leur couleur contre le ciel bleu, en lignes de perles grenat. tout le long de la rue qui monte, tu sais, on les voit. et ce jardin où la petite maison bizarre tend ses décorations de faïences, vertes, jaunes, rouges. il y a la grille qui entoure le jardin.
je passe devant tous les jours.
en arrière-plan d’autres choses réelles, comme une marche. le réel est partout, c’est effrayant. l’ovale de mes yeux, invisible, fait pour les regards en coin, le jeu de mes paupières pour aller mieux vers le sol.
tes yeux faits pour ce qui n’est pas en face de toi, surtout les visages, d’autant plus que ta bouche aujourd'hui se tait. tu es comme un serpent sage, qui vit et meurt autour des pierres. qui prend le froid comme un droit pour se reposer. qui est difficile à voir.

après-midi (s)

par ynos, mardi 14 avril 2015, 22:56 (il y a 3513 jours) @ Claire

le premier <3 <3

après-midi (s)

par Claire, mercredi 15 avril 2015, 11:48 (il y a 3513 jours) @ ynos

j'aime bien tes compliments :) merci

Terrible horses (les marquises)

par Claire, mercredi 15 avril 2015, 09:43 (il y a 3513 jours) @ Claire

soirée (s)

par Claire, mercredi 15 avril 2015, 09:50 (il y a 3513 jours) @ Claire

il y a une sorte de déchirure dans le rideau qui voile ces possibilités. de temps en temps, je passe une jambe dans l’ouverture. un tissu déchiré, bordé de franges à la fois misérables et sauvages, c’est la pauvreté de soi, la honte, qui ondule dans ces fils de trames exposés aux regards, arrachés.
ma jambe passe, je suis à cheval sur des haillons d’un bleu ancien...le temps a apporté son infinité de nuances et moi je suis là. d’un côté c’est la solitude, de l’autre c’est la jambe d’un autre dont je n’aperçois que le pied. Si nos cuisses s’accolaient, nos hanches se toucheraient, et puis nos flancs et que ferions-nous de nos bras sinon les tenir en arrière, et nos têtes porteuses de visages, comment pourraient-elles faire ? la frange des cheveux, ce qui balaie, les yeux fermés un moment et les bras alors, par derrière, se noueraient.
être ensemble, un court moment, savoir que c’est là, où on est, le tact est comme un miroir chaud, d’une profondeur de mer.

nuit (s)

par Claire, mercredi 15 avril 2015, 11:01 (il y a 3513 jours) @ Claire

ce sont les rêves qui m’ont fait repenser à ces choses, qui m’ont fait les désirer, me souvenir qu’elles existent. elles sont si faciles à oublier dans la vie, il n’y a que les rêves pour les vivre entièrement. cet exil n’a aucune clôture, sinon le langage. je voudrais être à côté de quelqu’un sans parler, presque sans penser.

nuit (s)

par Ynos, mercredi 15 avril 2015, 12:03 (il y a 3513 jours) @ Claire

Cette deuxième vague est vraiment chouette monsieur

nuit (s)

par Claire, mercredi 15 avril 2015, 13:31 (il y a 3513 jours) @ Claire

La mort est en haut de la colline, comme une masse difficile à voir, effondrée. est-ce qu’on peut monter ensemble vers ce lieu infesté d’oiseaux ? et quand tu te dis : où sont mes mains ? est-ce que ça suffit de les presser l’une contre l’autre ? la mort n’a pas besoin de nos mains, elle est ailleurs - en attente....ou pas. on ne sait. mais tes mains avec leur température, leur pression, le mouvement infini infini de leurs doigts, où les poseras-tu ? sur quel être qui sent, qui ressent ? quelque chose passe par les mains, un courant, d’eau, de rivière, de mer qui ressasse, de vent qui sépare, de lumière parfaitement posée immobile. tout par les mains passe, quel enfer nous les fait enfouir dans nos poches - jour après jour ?

nuit (s)

par cat, jeudi 16 avril 2015, 19:06 (il y a 3511 jours) @ Claire

le tout, ho que j'aime ça ! c'est du voyage et de l'étrangeté. j'aime vraiment beaucoup. il y a une sorte de calme, qui semble léger et est pourtant grave. ça semble doux et c'est en même temps plutôt puissant. et je crois que ça tient aux tonalités de la narration, puis au traitement, comme de petites touches, en camaïeux..

nuit (s)

par Claire, jeudi 16 avril 2015, 21:21 (il y a 3511 jours) @ cat

merci Catrine, je vais poursuivre.

soirée (s)

par Claire, dimanche 19 avril 2015, 10:54 (il y a 3509 jours) @ Claire

retour







On revient de la mer.
c’est l’heure où le ciel est gris, les champs bruns, l’air beige
au loin flotte
sur l’horizon sinueux un fin tracé de ville, palpitant, roux.

L’autoroute pointillée de rouge sang
la brume naissante
à la radio les voix qui bougent et se dilatent dans des spirales
de chants, de mélodies.
On voit encore bien dehors, rien n’est ni noir ni bleu.

La mer s’éteint sûrement derrière nous, poursuivant sa respiration de vagues
peu à peu elle change sûrement de couleur dans le soir.

Bientôt tu ne seras plus là, dans cette tranquillité
bientôt je me souviendrai de ce moment
- jeune fille assise
et de ce trajet.

De l’éolienne,
qui surgit à droite :
quelques secondes de grâce blanche et bleutée, ses longs bras mouvants.
Comme toi.

soirée (s)

par julienb @, dimanche 19 avril 2015, 12:09 (il y a 3509 jours) @ Claire

Très beau.

soirée (s)

par Claire, dimanche 19 avril 2015, 17:54 (il y a 3508 jours) @ julienb

merci Julien. c'est un vieux poème, la jeune fille est partie mais je la vois de temps en temps.
J'essaie de rassembler des poèmes autour du thème : être ensemble/ être seul.

soirée (s)

par Armor @, lundi 20 avril 2015, 13:17 (il y a 3508 jours) @ Claire

Impression de voir par petites touches qui dévoilent l'ensemble en même temps que des strates qu'on enlève pour révéler la densité. Très beau.

soirée (s)

par Claire, lundi 20 avril 2015, 20:23 (il y a 3507 jours) @ Armor

Oui, c'est ça, comme des strates. merci

Terrible horses (les marquises)

par Claire, mercredi 15 avril 2015, 10:41 (il y a 3513 jours) @ Claire

l’enfant autiste replie ses mains, pince son vêtement. il se tient raide dans la peur. la fillette n’a peur de rien, le monde est pris dans sa confiance. comme cette bulle commune, cette bulle pour mélanger l’eau et l’air, tourner dans les vertiges et retrouver la marche des tout petits. Là-haut, au-dessus d’eux, les oiseaux, la colline, le vent. la rivière avance le long d’un grand mur.