tiré du carnet

par ynos, jeudi 10 juillet 2014, 19:25 (il y a 3578 jours)

Voilà vingt ans que je m’oblige à rester dans le même état, en s’inventant des petits prétextes pour avoir l’air crédible, comme si nous avions donné à notre naissance, à la reconnaissance l’existence de la vie. Nous nous efforçons d’être toujours quelqu’un en passant d’une comédie à l’autre.
J’ai bien tenté de fuir le monde des hommes, tant il m’était devenu pénible de toujours maintenir le même être agonisant. Mais alors que j’essayais de n’être plus que le spectateur de moi même, lorsque j’eus réussis à oublier mon visage où s’était forgé l’expérience d’une vie, en rejetant tout ce qui tenait en mon prénom dans ce monde pour ne plus qu’appartenir au domaine du songe ; je me suis surpris à ne plus pouvoir reprendre mon souffle comme les noyés, à chercher dans l’air la vertu de vivre et de n’y trouver qu’une nappe d’angoisse à manger.
Je me retrouvai naufragé entre le monde des hommes qui m’était désormais hors d’atteinte car j’en connaissais trop bien le goût de la fuite et le monde des cieux où se plantent les racines de mon vertige.

tiré du carnet

par zeio, vendredi 11 juillet 2014, 02:53 (il y a 3578 jours) @ ynos

Superbe, j'aime beaucoup.

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par ynos, vendredi 11 juillet 2014, 19:04 (il y a 3577 jours) @ zeio

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par Claire @, dimanche 13 juillet 2014, 10:52 (il y a 3576 jours) @ ynos

Il me semble que l'art apporte une sorte de réponse au dilemme que tu décris. Pas forcément l'art qu'on pratique, aussi l'art qu'on reçoit.
Quand existe un espace où la vraie personne de soi (qui est sans qualité, sans nom, sans visage - juste une expérience sensible) a le droit d'exister, nous ne souffrons plus de devoir offrir dans le monde des autres cette sorte de masque nécessaire et fabriqué en partie par leur désir.
Parce que l'art n'est pas seulement de l'imaginaire, du rêve, du fantasme, il n'appartient pas qu'à notre intériorité.
Il est aussi un objet réel que nous offrons aux autres, que nous recevons d'eux.

Cette idée m'est venue en lisant quelque chose sur le dessin d'enfant : tentative de fabriquer une forme à partir de sa vie intérieure, pour la communiquer.

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par jude, mardi 15 juillet 2014, 15:34 (il y a 3574 jours) @ ynos

Sans doute y a-t-il un manque de compréhension de ma part mais je trouve que ta description de cet état n'est pas claire. Il me semble que tu opposes le paraître-à-autrui, la comédie-devant-autrui et l'être essentiel, vrai, l'être-à et pour-soi. Dans ce cas, une formulation me gêne:"j'essayais de n'être plus que le spectateur de moi-même". Cela me semble contradictoire.
Ce que recherche le "je", c'est précisément d'être enfin acteur authentique de lui-même.Non? Dès lors, il n'est pas logique d'essayer "d'oublier un visage où s'est forgée l'expérience d'une vie". Au contraire, il faudrait l'approfondir pour trouver sa propre "vertu de vivre"
Voilà pourquoi, si ton texte me paraît soulever des problèmes très importants,il me semble que tu ne les as pas encore bien cernés pour toi-même ou plutôt, tu approches une démarche que tu n'arrives pas à définir exactement en tout cas pour ton lecteur. (Il va sans dire que ,en l'occurrence, le lecteur paresseux qui aimerait qu'on lui mâche un peu plus le boulot c'est moi!;-)))!)
Merci à toi

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par ynos, mardi 15 juillet 2014, 23:39 (il y a 3573 jours) @ jude

cela dépend vers quel courant philosophique tu te positionnes
Il existe aussi bien cette notion "Ce que recherche le "je", c'est précisément d'être enfin acteur authentique de lui-même.Non?" que la notion inverse où l'être n'est pas une individualité mais un assemblage comme toutes les notes d'une musique et il est alors à notre guise d'en utiliser toutes les nuances.
Certains même seront encore plus tranchant dans cet avis sans parler d'ensemble

pour le moment moi je me contente de faire des bouts de réflexion, je choisirais plus tard :')