Cassandre

par vagabond vagabondant, mercredi 10 août 2016, 20:15 (il y a 2815 jours) @ vagabond vagabondant

Il nous suffit, cette nuit-là, d'être ensemble, Cassandre et moi, pour retrouver goût aux dédales, à la pénombre pleine de beauté, au parfum flottant des marécages, à l'impossibilité pour nos âmes d'entrer en repos.

Un même feu de paille intarissable piétinait les pavés, les fleurs et les regrets, louvoyait sous les ponts de pierre, fasciné par les voûtes et les arches et les convois de bêtes reptiliennes.

Cassandre, qui bondissait sa marelle d'un muret à l'autre, se découvrait des ingéniosités félines. La Seine insoucieusement se déplissait pour nous. Le ciel buvait le vin de nos voix. Je me laissais tomber dans la plus sereine des sobriétés.

Non sans malice, moi aussi, je me déplissais pour elle ; non sans malice, je devenais un gros chat ingénieux. Je maroulais mon destin en quelques raffinements provocateurs. Non sans malice.


Car je suis un mime marceau, le caméléon des méchantes tendresses : et les rues sont faites pour y jouer des claquettes, et les motos stationnées pour s'y assoupir publiquement.



*



Longuement, cette nuit-là, sur notre passage, nous sentîmes les portes s'émouvoir, des persiennes lever leurs cent paupières, les fenêtres délier leur transparence.

Longuement, cette nuit-là, les spectres de la ville nous toisèrent en silence. Ma solitude dansait avec le bonheur de Cassandre.

Je glissai mes paumes auprès des siennes, si douces et rêches, et elle me les serra avec la ferveur des toujours, comme on serrerait un coeur pour le marquer longtemps.

Je l'ai prise par les mains pour danser. À son tour, Cassandre l'espiègle me tira à elle, et d'elle je tirai tout le zèle de la ville, dont je consommais déjà - sans tristesse - l'absence savoureuse à venir.

Fil complet: