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par Rémy @, samedi 27 juin 2015, 00:35 (il y a 3440 jours) @ dh

Tiens, encore une accusation dans le vide : "business juteux pour certains", pour qui donc au juste ? Denis, arrête la parano, tu te fais du mal.

Je tiens l'info à propos de la rentabilité des romans d'un ami qui travaille chez Hachette - il passe chez les libraires vanter les dernières nouveautés et prendre les commandes, c'est son métier d'être au courant de ce qui se vend. Mais évidemment, ce n'est qu'une personne, et il ne représente qu'un éditeur.


À part ces on-dits, on peut consulter les statistiques officielles :
http://www.fill.fr/images/documents/chiffres_cles_livre_sll_2012_2013.pdf

L'évolution des ventes en valeur est négative en 2011, 2012 et 2013, en volume elle est indécise en 2011, négative en 2012 et en 2013. les prêts en bibliothèque ont baissé de 2% en 2012. Les gens lisent de moins en moins de livres.

La rentabilité est de 0,6% du CA en 2011. Fabriquer et vendre des livres est très peu rentable, les éditeurs ne sont pas riches.

Les achats forcés (livres scolaires, manuels de médecine et de droit, livres universitaires) représentent 13% des exemplaires vendus mais 23% du CA : ce sont eux les plus rentables.
La littérature jeunesse représente 21% des exemplaires mais seulement 13% du CA : elle n'est pas du tout rentable.
Les romans représentent 25% des ventes et 24% du CA, ils sont dans la moyenne de la rentabilité, juste un peu en-dessous des guides touristiques (13% des ventes, 14% du CA).
Théâtre et poésie ensemble représentent 0,4% des ventes et 0,2% du CA - c'est-à-dire pas rentables et insignifiants.


J'avoue que je me suis trompé sur les livres d'images, je les croyais plus importants que les petits pourcentages qu'ils atteignent.
Pour le reste, je m'y retrouve assez bien : le livre est un secteur en perte de vitesse, avec une rentabilité très faible ; le roman part de très haut, donc on a encore l'impression qu'il vit bien ; la poésie part de très bas, donc on voit bien qu'elle ne se vend pas.
On peut évidemment s'imaginer que les éditeurs sont des salauds et qu'ils refusent de publier de la poésie alors qu'elle pourrait être rentable - il est plus sage de penser qu'ils font leur métier pour gagner de l'argent et que s'ils découvraient de la poésie qui se vend, ils la publieraient.

Ça ne répond pas à la question "pourquoi la poésie se vend-elle moins que les romans ?", mais au niveau où c'en est (0,4% en incluant le théâtre contre 25%), il serait grotesque de se figurer que c'est le résultat d'une cabale. La poésie se vend moins que les romans parce qu'il y a infiniment moins de gens qui prennent du plaisir à en lire, voilà tout.

Sachant aussi que le roman comprend pour une bonne part les romans de gare, les romans à l'eau de rose et les nuances de Grey (James, Musso, Levy, Bussi squattent les meilleures ventes), il ne reste plus qu'à se demander comment écrire de la poésie qui s'adresse à ce public-là et qui lui procure des émois comparables. Moi je ne m'en sens pas capable, mais allez-y, vous.

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