banalité du rêve

par LOL, mardi 21 mars 2017, 11:53 (il y a 2594 jours) @ Claire

c'est vrai.

en relisant le passage avec ton impression, la rupture est désagréable. l'intelligence analytique qui rattrape par la manche la simplicité (presque animale) des gestes.

c'est vrai aussi qu'au réveil, beaucoup de rêves font sourire, voire rire. il y a un sérieux, une gravité, une prise "directe", comme tu dis, des événements sur soi (ou ce qu'il reste de soi). alors au réveil c'est un rire d'autodérision, un rire soulagé aussi. "ouf. ce n'était donc pas moi dans ma peau". on ne pouvait quand même pas être aussi prisonniers des choses, aussi forclos dans le cours anarchique et angoissant des événements!

tu me donnes à réfléchir.

c'est drôle, la perspective de vivre ma vie comme dans un rêve me met dans une position paradoxale. d'un côté j'ai ce fantasme de l'immédiateté. on pourrait dire de l'innocence absolue. d'un autre côté, il me semble que ce qu'on vit immédiatement dans les rêves, on ne le vit pas vraiment sous le mode d'un pur sentir ou d'un pur possible (fantasme d'artiste). plutôt de l'angoisse, du malaise, du sentiment tout à la fois de nécessité et d'impossibilité de faire autrement, sentiment d'enfermement. on me dira, il arrive aussi que les merveilles soient vécues comme telles, c'est vrai.

au fond, plus que d'être une succession d'événements fluides, qui se mordent les uns les autres comme dans l'oeil les reflets d'un kaléidoscope, je dirais que les rêves sont des variations autour de tonalités. avant tout, je les vois comme des états confus liés à des situations peut-être vécues, en tout cas imaginées, qu'on reproduit et déforme en dormant selon une logique qui échappe à la conscience. souvent d'ailleurs, les événements d'un rêve semblent engendrés par une impression qui les précède. il suffit de pressentir pour que quelque chose arrive conforme au pressentiment. c'est peut-être aussi ça le sentiment d'être aux prises directes avec les choses : le monde se crée et se calque à ce qu'on en attend (même dans l'horreur). en tout cas, peut-être que ça m'est personnel mais je ne me sens jamais fondamentalement surpris par ce qui arrive dans un rêve. ce qui ressort surtout c'est la fatalité et l'impuissance, le fait que "ça ne pouvait pas ne pas se dérouler comme ça".

c'est ce qui fait je crois que ça se prête aussi bien au récit qu'à la poésie.

impression que tout s'oriente toujours implacablement vers un dénouement (souvent : impossibilité d'agir, échec ou mort)
mais en même temps, tout semble dicté par l'atmosphère, la couleur affective de l'instant, la tonalité.

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