paresse (un début)

par julienb, mardi 15 septembre 2015, 11:25 (il y a 3359 jours)

Certains matins s’alanguissent longtemps dans la chaleur et la lumière. Ils semblent s’étirer à l’infini, et bien souvent la conscience s’y perd. Peu à peu, les ombres s’éteignent dans le jour qui croît. Tout se densifie : couleurs, sons, mouvements infimes. Pourtant, la conscience demeure confuse et vague.

C’est ainsi que tu profites du sommeil plus longtemps qu’à l’accoutumée. Un clair-obscur torpide emplit ta chambre étouffante, répugnante, dont les volets sont restés entrouverts. Le mince filet de soleil qui pénètre par cet interstice devient plus acéré, et tu commences enfin à t’agiter sur ta couche de vieille paille douteuse et de vermine. Lève-toi ! Lève-toi, et crache ! Fort bien. A présent tu marches jusqu’à la fenêtre que tu ouvres… pour en rabattre complètement les volets avant de te recoucher. Loque humaine.

Les oiseaux du jardin font un drôle de gargouillis. Tu quittes enfin ton antre, bien qu’à contrecœur. Empêtré dans ce jour qui ne veut pas de toi, tu dois commencer ces petites choses qui te font survivre, comme aller te vider les intestins ou bien les remplir. Surtout, tu attends le soir où tu pourras rôder dans les bois et les cours de fermes, braconner le petit gibier sous la lune. Pour le moment tu iras t’occuper à la cave, ou bien tu resteras assis dans la cuisine à regarder les murs et le plafond se craqueler autour des poutres vermoulues.

Tu vis comme un animal dans sa tanière. N’as-tu pas fini d’épier, tapi derrière ta fenêtre ? Tu ne penses qu’à faire le mal, tu ne connais que ça. Depuis combien de temps as-tu oublié ce qu’est la vie d’un homme, un ami, une femme ? Tu fais honte à ton espèce, et c’est ce qui me plaît en toi. Tu fais honte à ton créateur et c’est pourquoi je t’ai choisi.

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