[mais ça fait mal un peu quand même]

par catr, lundi 07 décembre 2015, 14:31 (il y a 3276 jours) @ Claire

j'avais commencé une suite de textes situant l'être entre sa maison extérieure, celle qui l'abrite, et sa maison intérieure, celle qu'il abrite. mais l'écriture s'est arrêtée. par la sensation de flottement (recherchée), tranquillement je me suis souvenue de l'ancienne maison de ville que mes grands-parents habitaient et à laquelle nous nous rendions, tous petits enfants avec ma mère. en y repensant j'ai retrouvé le sentiment exact d'une disparition. la sienne. puis, la mienne aussi, dans les immenses rideaux de velours turquoise doublés de grands-jours crissant. j'adorais cette gigantesque maison anglaise, ses quatre étages, sa chambre de cèdre que j'avais nommée "le trésor de Naphtaline" comme s'il s'agissait de la chambre d'une personne. cette maison comptait douze lits, sept salles de bain, deux salons, et plus et tant. elle comptait également une loge de jardinage. c'est cette dernière qui m'était particulièrement fascinante : il y faisait sombre et l'odeur qui y régnait, entre terre noire et moisissure, me faisait frissonner, sur les étagères très sales et poussièreuses s'alignaient de petits bocaux de verre soigneusement étiquetés où étaient rangés les bulbes de tulipes, de narcisses, de jacynthes, et toute une collection de graines aux formes étonnantes. ma grand-mère chuchotait en disant que "tout le monde dormait" dans ses petits pots, j'étais convaincue qu'elle cachait de la mandragore et autres condiments de parfaite sorcière. c'est en retrouvant ces souvenirs que je réalisai que je n'avais jamais eu d'autres maisons que celles que ma grand-mère avait habitées...

bien des années plus tard, grand-mère dirait comme si elle venait d'échapper un vase de chine "ho! la maison ! la maison !" en couvrant immédiatement sa bouche de ses deux mains, réprimant à la fois l'amour pour la demeure et la douleur intime, incurable, du décès de sa fille ainée.

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