Péridurale du poète

par Claire, mercredi 06 juillet 2016, 09:42 (il y a 3064 jours) @ Rémy

Je vais intervenir malgré mes bonnes résolutions, parce que tu vas un peu loin dans tes interprétations, Rémy, et surtout tu parles de choses que - forcément - tu ne connais pas.
L'accouchement, c'est intense et violent, comme une tempête organique, à la fin on est presque plus consciente de ce qui se passe tant la sensation est forte.
Quand tout va bien, la douleur est supportable parce qu'elle est rythmique, avec des pauses prévisibles, et surtout qu'on est active. Et quand tout se passe bien, que la naissance est heureuse, qu'on n'est pas du tout inquiet, c'est peut-être la seule occasion qui existe de ressentir une douleur liée au bonheur, et non à la peur et au refus, à la maladie, à l'accident. C'est une sacrée expérience, qui permet de se rendre compte du poids du psychologique dans la perception de la douleur.
Du coup, ça vaut la peine de l'avoir vécu, je trouve, même si la péridurale (j'ai connu ça pour la troisième naissance) permet d'être plus consciente de ce qui se passe et donc de profiter un peu plus de l'évènement, d'une autre façon...mais on a mal quand même, hein ! :)


En dehors de cette affaire je voudrais te dire ceci, de façon générale : tu me parais incapable de faire la différence entre plainte, complaisance masochiste, et travail d'élaboration de la douleur.
A cause de mon métier, je sais que la position d'élaboration, de travail autour de la souffrance se fait dans une forme de bonheur, quand elle se passe dans un échange. C'est le plaisir de penser. Et c'est souvent des choses qu'on sent à l'œuvre dans des productions artistiques.
C'est aux antipodes de la plainte et de la complaisance, c'est un voyage courageux et actif dans la douleur, pour la transformer.

L'autre position, que tu me sembles prôner systématiquement : l'humour, voire l'ironie, la tape dans le dos, le "arrête-de-penser-à-ça-pense-plutôt-à-ce-qui-va-bien", le "tu-nous-fatigues-avec-tes-malheurs" et la méthode Coué ont leur intérêt souvent, mais il y a une forme de violence quand elle est trop insistante. C'est la position de quelqu'un qui se défend à sa manière et qui veut forcer l'autre à se défendre de la même façon, parce que son malheur le dérange.

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