(nt)

par Claire @, vendredi 05 décembre 2014, 10:43 (il y a 3644 jours)

Dans ce territoire qui ne regarde personne
entouré de murets de pierre
tournent deux chevaux -
ou bien ils se tiennent dressés
immobiles.

J’ai en tête le bruit du galop
et les parcelles de terre
qu’il projette alentour
pourtant dans ce pays sans vis-à-vis
règne un silence
de film muet.

C’est ce qui donne tant de force
aux pas que je fais pour y retourner
deux chevaux m’ignorent
le soleil est coulant et doux
la menthe pousse
au pied d’un des murs.

Quand je marche dos au crépuscule
je vois mon ombre sortir de mes pieds
et marcher avec moi
je suis comme un propriétaire
qui fait le tour de ses possessions.

Il y a longtemps que j’ai pris l’habitude
de venir ici avec mon ombre allongée
diagonale sur le vert des talus
j’ai oublié même le rêve
qui différait un peu.

Je suis comme un propriétaire
négligent, détaché
qui a hérité il y a quelques années
d’un souvenir d’enfance
et regarde ses possessions
sans les aimer vraiment

Sans leur appartenir. Pourtant sans les explorer
ni les maintenir

mais je regarde les arbres
de chaque côté.

Soudain, j'ai l'impression de percevoir le temps
qui les a élevés au dessus de la terre
depuis la première pousse la petite racine
qui a trouvé où s’enfoncer,
où boire

C’est comme si j’étais revenue chaque jour
sentir l’infime poussée
ce désir vertical, constant
qui a fait d’eux des arbres adultes
en trente ans.

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