nt & aussi

par catr, dimanche 24 janvier 2016, 22:07 (il y a 3228 jours) @ Claire

Le lecteur est un interlocuteur. dis-tu, en bout de ligne oui, quelque part on ne sait où. mais au moment d'écrire, l'auteur y pense-t-il, est-ce volontaire, est-ce conscient et jusqu'où?
... personnellement "au moment d'écrire" je tu il elle on nous vous ils ou elles, je sais que je ne pense pas à ça, et je ne me dis jamais que je veux que ça fasse tel et tel effet, de toute façon ça sonne faux ou ça ne marche pas du tout, donc j'ai låché ça depuis un méchant bout de temps. "au moment d'écrire" je ne pense à "rien", je suis un espace libre, ou en vacance, quelque chose se place et je ne sais pas ce que c'est ... je le laisse prendre place. alors l'adresse c'est pour moi un mystère. puis parfois un texte ne me parle (se révèle) que des années après l'avoir écrit, pas vraiment à chaud, plus tard je relis des trucs et là je comprends ce que j'étais en train de faire à ce moment d'écrire et pourquoi, mais rarement sur le coup. alors qu'est-ce qui se joue, pourquoi et comment ?
..à moins d'avoir une approche hyper intellectuelle et étudiée, ou de s'auto-hyper-analyser... même à ça... (remarque : je suis trop intuitive pour ce genre de démarche, moi ça m'étouffe lolll d'où le fait de très peu publier de livres parce que ça me stoppe complètement).
...donc je me dis qu'en tant que lecteur-interlocuteur il faut rencontrer très longtemps une main d'écriture ou lui laisser le temps — il y a une forme de générosité à la patience là-dedans, ou l'inverse — et simultanément accepter et toujours se rappeler qu'on ne sait pas vraiment, on ne peut pas (même dans la tête de l'auteur on ne comprendrait pas tout).

de l'interlocuteur, on ne sait en général rien du tout, et ce qu'il capte pense vit avec un texte, ça lui appartient en propre, je veux dire que cet interlocuteur (indéfini) est rejoint ou se rejoint lui-même (ou pas du tout) avec l'écriture mais en fonction de ce qu'il expérimente, engrange... c'est de l'inconnu total... peut-être qu'on ne peut qu'appréhender pourquoi on résonne avec tel type d'écriture, tel genre d'auteur, mais encore ... n'y perd-on pas une sorte de joie ou son renouvellement ?

depuis des années nous nous lisons mutuellement, plusieurs d'entre nous ici, nous lisons des tentatives, de bouts de cartes, de territoires, des segments, des parcelles, petits bouts de, c'est un peu comme des morceaux de casse-tête, ou des tessons, éparpillés, comme de menus trésors sur une plage, une couleur inattendue dans un jour gris (je dis ça... je ne sais pas..) ça ne laisse jamais qu'entrevoir une trame de tissage, je veux dire on ne voit jamais tout l'ensemble... ni de ce qu'on fait, ni de ce qu'on est, ni du monde, ni du réel...

en somme, tu ou je ou il et elle, ce sont des milliards de possibles, ce sont des résonateurs, des balises pour des fréquences non-rencontrées
... peut-être ... peut-être...

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