K. dort un sommeil de plomb (absurdité)

par zeio @, jeudi 01 octobre 2015, 01:50 (il y a 3133 jours) @ zeio

La nuit. Le choucas, attaché à la table de travail, à l’affût, comme un chien enchaîné dont les yeux de guetteur fixent au loin, par-delà les murailles, les intrus qui menacent à chaque instant de pénétrer sur son territoire. Soumis, dévoué, le choucas rêve de dominants, de maîtres indifférents qui l’emprisonnent. Quelques mouvements parasites, sur le bord du regard, mettent en péril la quiétude qu’il exècre. Entre lui et les étoiles, la cloison mitoyenne, qui l’empêche de vivre, à laquelle il ne renoncera jamais. Il n’en admire pas moins l’arborescence végétale qui tente, dans la cour intérieure, de s’élever maladroitement jusqu’au ciel. Ses doigts ambigus se confondent avec les branches entortillées, ils montent, écrivent. Ses mains faibles ont laissé tomber sa mémoire. Il en a gardé tous les nœuds. Pris dans le mouvement giratoire de la foule il a rêvé d’extractions, de perditions. Incohérent comme un étranger. Il veut terminer l’œuvre architecturale d’un ancêtre qu’il ignore. Il rend un hommage harmonieux aux choses discordantes. L’absurdité est la demeure. La sœur dodeline du corps, sommeille, dissoute dans la fumée de la cigarette. Trois petits coups sur le mur, la sœur ne répond plus. Le rideau ondule lentement. Un chat sur les tuiles, avance, se retourne, passe par un interstice, disparaît.

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