K. dort un sommeil de plomb (absurdité)

par zeio, vendredi 22 avril 2016, 00:13 (il y a 2930 jours) @ zeio

Des portes fermées, et son regard à peine ouvert. Son monde se délivre par saccades. La raie de lumière, sous l'effet de l'oscillation du grand arbre qui fait face à sa fenêtre, atteint par intermittences la table de travail. Elle semble abonder dans le sens de son incertitude. Il existe quelque part, un grouillement, une masse vivante, prête à aller au front. K. la retient dans son retranchement, il coupe-court à l'assaut, sans pour autant sonner la retraite : il veut garder la guerre en suspend, pour ne pas qu'elle lui explose à la figure, comme le ferait sans retenue le soleil imperturbable, s'il n'était pas tenu à l'écart pour le moment par le volet à-demi clos. Il faudra bientôt aller dans le monde, non sans l'avoir préalablement reconstruit dans son for intérieur. S'il veut véritablement déployer son existence, il lui faudra voir à-travers les yeux de l'autre, et, si le sortilège ne rencontre aucune limite sensible, il la regardera à-travers de nombreux autres yeux, jusqu'à ce que l'univers se glisse affectueusement dans son cœur. Il se tourne vers l'horloge : il est neuf heures. Dans la demeure il y a le silence. K. est le dernier levé. Le dernier présent. La rue elle aussi semble plus calme qu'à l'ordinaire. Un résidus de son rêve pose une main sur la fenêtre, qui s'ouvre légèrement.

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